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LA CITÉ DE CARCASSONNE.

il était possible d’opposer à l’assaillant une résistance solide, de le culbuter et de s’emparer même du beffroi.

C’est dans ces détails de la défense pied à pied qu’apparaît l’art de la fortification du xie au xve siècle. En examinant avec soin, en étudiant scrupuleusement, et dans les moindres détails, les ouvrages défensifs de ces temps, on comprend ces récits d’attaques gigantesques que nous sommes trop disposés à taxer d’exagération. Devant des moyens de défense si bien prévus, si ingénieusement combinés, on se figure sans peine les travaux énormes des assiégeants, les beffrois mobiles, les estacades et bastilles terrassées, les engins de sape roulants, tels que chats et galeries, ces travaux de mine qui demandaient un temps considérable, lorsque la poudre à canon n’était point en usage dans les armées. Avec une garnison déterminée et bien approvisionnée on pouvait prolonger un siège indéfiniment. Aussi n’est-il pas rare de voir une bicoque résister pendant des mois à une armée nombreuse. De là, souvent, cette audace et cette insolence du faible contre le fort et le puissant, cette habitude de la résistance individuelle qui faisait le fond du caractère de la féodalité, cette énergie qui a produit de si grandes choses et un si grand développement intellectuel au milieu de tant d’abus.

Indépendamment des portes percées dans l’enceinte intérieure, on comptait plusieurs poternes. Pour le service des assiégés, — surtout s’ils devaient garder une double enceinte —, il fallait rendre les communications faciles entre ces deux enceintes et ménager des poternes donnant sur les dehors, pour pouvoir porter rapidement des secours sur un point attaqué, faire sortir ou rentrer des corps, sans que l’ennemi pût s’y opposer. En parcourant l’enceinte intérieure de Car-