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ne peut s’appliquer aux harnais de mailles ou aux harnais mixtes composés de mailles et de plates, adoptés pendant le cours du xive siècle. Ces habillements de guerre avaient pour nom adoubement et harnois. Cependant, afin d’éviter la confusion et les redites, nous comprenons dans cet article les diverses modifications qu’a subies l’habillement militaire de l’homme d’armes, du cavalier armé, depuis l’époque carlovingienne jusqu’à la renaissance. Les articles du Dictionnaire donnant chacune des pièces de cet habillement par le menu, nous ne présentons ici qu’un aperçu général des transformations du harnais militaire du cavalier.

Au viiie siècle, sous le règne de Charlemagne, l'habillement de l’homme de guerre à cheval, en Occident, était un mélange des traditions romaines ou apportées par les populations venues du nord-est. On sait que la cavalerie des armées romaines se composait en très-grande partie d’auxiliaires numides, germains, gaulois, et même asiatiques vers les bas-temps. Le noyau de l’armée romaine était formé des légions, c’est-à-dire d’une infanterie solide, aguerrie, propre à tout, combattant et faisant des routes, des campements, des travaux de siège. La cavalerie était employée à faire des reconnaissances, à couvrir les ailes, à fourrager, à tourner un ennemi tenace, à poursuivre des fuyards et ramener des prisonniers. Il n’en fut plus ainsi dans les armées qui, du nord-est, se précipitèrent sur les provinces occidentales, si toutefois on peut donner le nom d’armées aux masses qui, sous le titre d’auxiliaires, hâtèrent la chute de l’empire. L’infanterie n’a de valeur qu’autant qu’elle est soumise à une discipline sévère, à une organisation administrative puissante ; aussi n’y a-t-il d’infanterie que chez les peuples civilisés. Les troupes de barbares se composent principalement d’une cavalerie chez laquelle l’élan, la fougue, remplacent la discipline et la tactique. Il ne faut pas oublier, d’ailleurs, que les peuplades guerrières qui s’établirent en Occident dès le ve siècle étaient de race aryane, et que les aryâs, aussi loin que l’on remonte dans l’histoire, ont été les premiers cavaliers du monde. Ceci explique comment, pendant le moyen âge, le cavalier fut longtemps considéré comme l’homme de guerre par excellence, et comment l’infanterie, qui sous l’empire avait la prépondérance dans les opérations militaires, ne fut plus considérée que comme un corps auxiliaire auquel, dans une action, n’était réservé qu’un rôle secondaire.

Nous prendrons donc comme premier type l’homme de guerre à cheval, sous Charlemagne. D’assez nombreux monuments permettent de se faire une idée exacte de son équipement. Il était de diverses