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archers aux deux ailes ; la gendarmerie française se divisa pour attaquer et déborder ces ailes, mais l’un de ces corps, celui des Lombards, ayant couru sus aux bagages après avoir passé sur le ventre d’une des ailes, le centre des Anglais, composé de six cents lances, se jeta sur la cavalerie française et la déconfit.

Pour empêcher la cavalerie de mettre le désordre dans les rangs des archers, ceux-ci portaient avec eux un pieu qu’ils fichaient en terre au moment de combattre, et formaient ainsi une palissade espacée suffisante cependant pour arrêter les charges des hommes d’armes, d’autant que ces pieux dirigeaient un de leurs bouts aiguisés du côté de l’assaillant. Les Anglais se présentant devant le corps d’armée français qui assiégeait Beaugency (1428), « lesquelz (Anglais) plainement parchevans que Franchois estoient rengiés par manière de bataille, cuidans que de fait les deussent venir combattre, prestement fut fait commandement exprès de par le roy Henry d’Angleterre, que chascun se meist à pié, et tous archiers eussent leurs peuchons estoquiez devant eulx, ainsi comme ils ont coustume de faire quant ilz cuident estre combattus[1]. »

L’arc français, pendant le xiiie siècle, n’était pas très-grand. Il n’avait guère que quatre pieds de long. Il était lourd, épais, et sa portée était peu étendue. L’arc anglais, dès le xive siècle, avait de cinq à six pieds de longueur ; il était plus léger et fait habituellement de bois d’if ou d’érable. Sa portée était de deux cents à deux cent cinquante pas. Les flèches étaient de bois de pin ou de frêne et avaient quatre palmes à quatre palmes et demie de longueur (trois pieds ou 0m,95 environ). La flèche française, au xive siècle, n’avait guère que 0m,70[2]. L’équipement de l’archer bourguignon et français au commencement du xve siècle, et jusqu’à 1450 environ, se composait d’une cervelière de fer, d’une brigantine ou d’un jaque, de genouillères et de grèves. L’archer portait au côté gauche une longue épée droite à deux tranchants ; au côté droit, la trousse, qui contenait de quinze à vingt-quatre flèches, et sur le dos l’archier. Il n’était pas, comme l’arbalétrier, couvert de ce grand pavois lourd et embarrassant. A dater de 1450, il y eut en France des compagnies d’archers à cheval, vêtus de la salade, de

  1. Témoign. des chroniqueurs et historiens du xve siècle. Procès de condamnation et de réhabilitation de Jeanne d’Arc, par J. Quicherat, t. iv, p. 417.
  2. Voyez Flèche. Nous possédons des flèches de cette époque, rapportées de Rhodes par M. Salzmann, qui datent du xve siècle et n’ont que cette longueur.