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[ BANC ]
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Grégoire de Tours[1], « mandé par Chilpéric ; le roi était debout, près d’un pavillon formé de branches d’arbres. A sa droite était l’évêque Bertrand ; à sa gauche, Raguemod. Devant eux un banc[2] chargé de pains et de mets divers »

Il était d’usage de couvrir de tapis les bancs posés autour des salles, du temps de Grégoire de Tours. « Waddon arrive, entre aussitôt dans la maison, et dit : — Pourquoi ces bancs ne sont-ils pas couverts de tapis ? Pourquoi cette maison n’est-elle pas balayée ?…[3] » Lorsque Robert, duc de Normandie, entreprend d’aller en pèlerinage à Jérusalem, passant à Constantinople, il est admis avec les Normands de sa suite, à une audience de l’empereur d’Orient. La salle dans laquelle les seigneurs normands sont reçus était dépourvue de siéges : ceux-ci se dépouillent de leurs manteaux, les jettent à terre, s’asseyent dessus et dédaignent de les reprendre en partant. Le duc répond au Grec qui veut lui rattacher son manteau.

« Jo ne port pas mun banc od mei »

« Pur la noblesce des Normanz,
« Ki de lur manteals firent bancz,
« Fist l’Emperor el paleiz faire
« Bancz à siege envirun l’aire ;
« Ainz à cel tems à terre séeint,
« Ki el paleiz séer voleient[4]. »

A Constantinople, l’usage des siéges était donc inconnu au XIe siècle, et les Grecs s’asseyaient à terre sur des tapis, comme les Orientaux de nos jours. Par courtoisie, l’empereur fait faire des bancs autour de la salle du palais, afin que les Normands puissent s’asseoir conformément à leurs habitudes, pendant leur séjour à Byzance.

Guillaume, duc de Normandie, apprend la mort d’Édouard et le couronnement de Harold, étant à la chasse ; il devient pensif, rentre dans son palais, et :

<poem class="lang-fro" lang="fro" style="font-size:83%; " >:::« Al chief d’un banc s’est acotez,

« D’ores en altre s’est tornez,
« De sun mantel covri sun vis,
« Sor un pecol (appui) sun chief a mis ;
« Issi pensa li Dus grant pose,
« Ke l’en parler à li n’en ose[5]. »
  1. Lib. V.
  2. « … Et erat ante scamnum pane desuper plenum, cum diversis ferculir… »
  3. Ibid., lib. IX.
  4. Le Roman de Rou, 1re partie, vers 8273 et suiv.
  5. Le Roman de Rou, 2e partie, vers 1109 et suiv.