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CÉRÉMONIES, SACRES, COURONNEMENTS.

est conduite ainsi jusqu’à son trône, et le même ordre est suivi comme pour le roi pendant le reste de la cérémonie.

Un grand festin était donné après le sacre et le couronnement. Philippe-Auguste fut servi par le roi d’Angleterre pendant ce banquet du sacre, le vassal à genoux[1]. Pendant ces fêtes, on tendait des étoffes dans les rues de la ville. Au sacre et couronnement de la reine Marie de Brabant, en 1275, à Paris, « les bourgeois firent aussi fête grande et solennelle ; ils encourtinèrent la ville de riches draps de diverses couleurs. Les dames et pucelles s’éjouissoient en chantant diverses chansons[2]. » On se ferait difficilement une idée aujourd’hui du luxe déployé dans les cérémonies des couronnements et de l’hospitalité donnée à tous venants pendant plusieurs jours ; par les princes à cette occasion, s’il ne nous était pas resté des descriptions assez détaillées de ces solennités. Un écrivain de Londres, clerc probablement[3], vers la fin du XIIIe siècle, raconte ce qui fut fait au palais de Westminster pour le couronnement d’Edward Ier, en 1273 : « Tout l’espace de terrain vacant dans l’enclos du palais de Westminster fut entièrement couvert de maisons et dépendances. Plusieurs salles furent construites au sud du vieux palais, autant qu’il en put tenir, dans lesquelles des tables, solidement fixées sur le sol, furent dressées pour régaler les grands et tous les nobles le jour du couronnement et pendant deux semaines après. Tous ceux qui vinrent à la solennité, riches ou pauvres, furent reçus et nourris gratuitement. Des cuisines en grand nombre furent bâties dans le même enclos, et, dans la crainte qu’elles ne pussent suffire, des chaudières de plomb en nombre incalculable furent disposées au dehors, en plein air, pour la cuisson des viandes. » L’auteur fait remarquer que « la cuisine principale dans laquelle les volailles et autres mets devaient être cuits était entièrement découverte, afin de permettre à la fumée de s’échapper librement ». Les comptes des dépenses faites à cette occasion mentionnent « l’acquisition de 300 tonneaux de vin qui coûtèrent, compris le transport, 643 livres 15 s. 4 d. Il en fut bu 116 le seul jour du couronnement. Ces vins provenaient en grande partie de Bordeaux ». Ces mêmes comptes relatent l’achat des chaudières de plomb, l’établissement

  1. La Chronique de Rains, chap. I, manuscr. de la Biblioth. nation., publ. par L. Pâris, Techener, 1837.
  2. Rubriq. et chapitres du bon roy Philippe, fils de Mgr saint Louis (Coll. des mém. relatifs à l’hist. de France, de MM. Michaud et Poujoulat, t. II, p. 158).
  3. Voy. Domestic Architect., by T. Hudson Turner, t. I, p. 64. Oxford, Parker, 1851.