Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné du mobilier français de l'époque carlovingienne à la Renaissance (1873-1874), tome 1.djvu/172

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
[ LAVOIR ]
— 154 —

qui a été fondu en 1702 pour employer aux dépenses du bâtiment neuf »

Le lavoir est de bronze, divisé en trois compartiments, que l’on remplissait probablement en raison de la quantité de personnes qui venaient laver ; ou chaque compartiment, ainsi que les gargouilles y correspondant, était peut-être affecté aux différents degrés du couvent : aux abbesses, prieures, sous-prieures, etc. ; aux nonnes et aux novices. Il est percé de onze gargouilles posées à des hauteurs différentes. Le dessin fait supposer que le bronze était émaillé sur les écussons armoyés et dans les bordures. La cuvette qui reçoit les eaux était également de bronze. Ce magnifique lavoir datait certainement de la fin du XIIe siècle ou du commencement du XIVe. La figure 2 en donne le détail.

Dans les palais, depuis le XIIIe siècle, on ne se servait plus des lavoirs : lorsqu’on se mettait à table, des écuyers apportaient à laver au seigneur, dans un bassin ; des serviteurs, aux personnages moins élevés en dignité (voy. le Dictionnaire des ustensiles, au mot Bassin). Cet usage se conserva jusqu’au commencement du dernier siècle. C’était sur la crédence que l’on plaçait le bassin et l’aiguière destinés au lavement des mains avant et après les repas.

« Quand tous ceux-cy furent entrez, on prit aussitôt à l’autel de la crédence un grand bassin d’argent doré avec une aiguière de mesme estoffe, et d’un des côtés de la nef qui estoit sur la table on prit une serviette plyée à fort petits plis. Avec tout cecy, les trois que je viens de dire[1] se lavèrent tous les mains, puis ceux qui estoient de cette suite auxquels on bailla d’autres serviettes, et aussitôt chacun se vint seoir[2]… » Puis après le repas : « … Après que chacun se fut rassasié de ces délicatesses, on commença à desservir ceux du bas bout, car en ceste action là ils escorchent l’anguille par la queuë. Et après qu’on eust tout osté, on apporta à ceux qui estoient demeurez à table (d’autant que la pluspart s’estoient levez) un grand bassin d’argent doré avec un vase de mesme estoffe, et dedans de l’eau où avait trempé de l’iris, avec laquelle ils lavèrent leurs mains, ceux du haut bout séparément, et ceux qui estaient au-dessous ensemblement, et toutefois (ajoute l’auteur de cette curieuse satire[3]), elles ne dévoient pas

  1. Henri III et deux de ses mignons.
  2. L’Isle des Hermaphrodites, pour servir de supplément au Journal de Henri III. Cologne, 1624.
  3. D’Aubigné, croit-on.