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[ LANDIER ]
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paraient dans de petits poêlons. Les réchauds remplis de biaise à la tête des landiers, se trouvant à la hauteur de la main et hors du foyer de la cheminée, facilitaient la préparation de ces mets.

Nous donnons (fig. 1) un de ces landiers de cuisine déposé au musée de Cluny. Sa hauteur est de 1m,12 ; le diamètre du réchaud supérieur est de 0m,25. A la base de la tige, on voit trois crochets destinés à supporter la broche. Vers la partie supérieure de la tige est un crochet recouvert A, muni d’une boucle B, à laquelle étaient suspendues les petites pincettes destinées à attiser le feu du fourneau supérieur C, une cuiller de fer ou une fourchette, pour retourner les viandes ou remuer les sauces. Cette boucle, dont nous donnons le détail en E, était faite de façon que les pincettes, en raison de la forme de leur tête G, pouvaient facilement être suspendues au crochet F. Les objets accrochés aux boucles E servaient également pour le rôti. On voit en C le réchaud de fer battu qui se posait sur la tête D du landier, pour recevoir la braise. Les gens de la cuisine mangeaient même sur ces petits fourneaux, tout en se chauffant[1]. Quelquefois, mais plus rarement, la tête du landier se divisait en deux réchauds[2]. C’était donc alors quatre plats que l’on pouvait apprêter et faire cuire en dehors du foyer, sur lequel étaient suspendues une ou plusieurs marmites au moyen de la crémaillère et de trépieds, et devant lequel tournaient une ou deux broches garnies de plusieurs pièces. La cheminée suffisait seule ainsi pour apprêter un repas abondant (fig. 2).

Dans le Charrois de Nymes, IIe livre de Guillaume d’Orange (chansons de geste des XIe et XIIe siècles, il est question du bagage du prince porté par trois cents bêtes de somme ; les meubles et ustensiles destinés à la cuisine ne sont pas oubliés :

« Bien vos sai dire que reporte li tierz :
« Preoz et pailles, chauderons et trepiez,
« Et cros agus, tenailles et landiers ;
« Quant il venront el règne essilié
« Que bien en puissent atorner à mengier ;
« S’en serviront Guillaume le guerrirer,
« Et en après trestoz les chevaliers. »

La fig. 2 fera comprendre les divers procédés de cuisson employés simultanément autour de l’âtre. Ordinairement un gros anneau était

  1. Nous avons encore vu cet usage conservé dans quelques campagnes de l’ouest et du centre de la France.
  2. Il existait encore, il y a quelques années, des landiers à deux réchauds dans une