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et a été gravé plusieurs fois. Gaignières, dans sa collection[1], en a donné un bon dessin. Comme corollaire de ces tombeaux cénotaphes, il faut citer les monuments appliqués contre les murs, et qui présentent sur une surface verticale comme le développement de toutes les parties qui constituent le mausolée, avec soubassement, image du mort et dais.

Ces sortes de monuments sont assez rares en France ; le défaut d’espace et aussi le défaut d’argent faisaient parfois adopter ce parti. Nous en connaissons deux beaux exemples dans l’ancienne cathédrale de la cité de Carcassonne. L’un date du milieu du XIIIe siècle, c’est celui de l’évêque Radulphe. Le simulacre du sarcophage, qui persiste tard dans les provinces méridionales de la France, est posé sur trois colonnettes et paraît engagé dans la muraille. Des chanoines, sous une arcature, assistent aux obsèques. Sur le sarcophage se dresse debout, en bas-relief, la figure de l’évêque bénissant. Un gâble orné de fleurons et de crochets couronne le tout. L’autre tombeau (fig. 26) date du commencement du XIVe siècle : c’est celui de l’évêque Pierre de Roquefort, qui fit rebâtir le chœur de l’église et deux chapelles voisines du transsept[2]. Ce monument, ainsi que le montre notre tracé, présente en rabattement, dirons-nous, la disposition des tombeaux cénotaphes ; l’évêque n’est pas couché sur le socle, qui n’est qu’un placage, mais se dresse sur ce socle ; il est couronné par un dais plaqué ; un chanoine et un diacre accompagnent la figure principale dans deux arcatures latérales. Ainsi que nous le disions, cette disposition est rare en France, et nous n’en connaissons pas d’exemple, encore existant, dans les provinces du Nord.

Il nous reste à parler des plates tombes, avec effigies en relief ou simplement gravées sur la pierre ou sur le métal. Ces tombes sont de deux

    p. 1293) : « Son effigie (du roi Charles VIII) revestue à la royalle, et de genoux au-dessus du tombeau, est représentée après le naturel, laquelle est de fonte ; le haut du dit tombeau couvert de cuivre doré, et au devant de l’effigie il y a un oratoire, ou appuy, et couvert de cuivre doré, sur lequel est posée une couronne avec un livre ouvert, aussi de cuivre doré. Pareillement y a aux quatre coins quatre anges de fonte bien dorez et eslabourez, lesquels tiennent les armoiries des royaumes de Naples et Sicile, aussi de fonte, dorées et peintes. Aux costés du tombeau y a des niches rondes, et au dedans, des bassins de cuivre bien doré, et en iceux bassins de basses figures de fonte bien dorées. »

    D. Millet, dans son Trésor sacré de l’abbaye royale de Saint-Denys en France, 1640, dit : « Son sepulchre (du roi Charles VIII) est le plus beau qui soit dans le chœur, sur lequel on voit son effigie représentée à genouil près le naturel, une couronne et un livre sur un oratoire (prie-Dieu), et quatre anges à genoux aux quatre coings du tombeau, le tout de cuivre doré, sauf l’effigie dont la robe est d’azur, semée de fleurs de lys d’or. »

  1. De la Bibl. Bodléienne. Voyez la gravure de l’ouvrage de Félibien, Abbaye royale de Saint-Denis.
  2. Voyez Cathédrale, fig. 49. Le tombeau de Pierre de Roquefort est placé contre le mur occidental de la chapelle du nord. Ce prélat est mort en 1321.