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rieur peut être différente de celle visible à l’extérieur. Nous irons plus loin, nous dirons que ces deux ossatures doivent être absolument différentes, et nous allons expliquer pourquoi. Quand les Romains construisaient un arc-doubleau, une tête de berceau portant charge, ou même un arc de décharge, ils avaient le soin de procéder ainsi que l’indique la figure 3 en A : ils maçonnaient, à partir de la naissance, le quart de l’arc environ en rangs de briques liaisonnées, puis les deux quarts restant en rangs de briques extradossées. Comme ils construisaient les arcs de décharge avant les remplissages que ces arcs avaient pour fonction de soulager, il fallait nécessairement cintrer ces arcs. Le système des rangs d’arcs extradossés permettait de ne pas charger outre mesure le cintre de charpente à son point le plus faible, puisqu’on commençait par poser le premier rang de claveaux DE. Ce rang posé, le cintre n’avait plus rien à porter, et l’on pouvait bander les deux autres arcs. Si cependant les constructeurs romains avaient eu seulement l’intention de ne pas charger le cintre de charpente, du moment que le premier arc eût été bandé, ils auraient maçonné le reste de l’épaisseur de l’arc de briques liaisonnées, en se servant du premier arc comme d’un cintre très-suffisamment résistant ; mais nous voyons au contraire que, sans exception, les parties supérieures des arcs-doubleaux ou de décharge sont maçonnées en rangs de briques extradossées. Cette méthode était justifiée par l’expérience. Si nous supposons l’arc A (arc de décharge du mur de précinction du Panthéon de Rome) construit entièrement en briques liaisonnées, ainsi qu’il est tracé en B, et qu’il survienne un écartement dans les culées F, G, par suite d’une commotion telle, par exemple, qu’un tremblement de terre, ou un tassement, cet arc se rompra à l’extrados en H, et à l’intrados à la clef, en I ; toutes les pressions viendront dès lors agir sur les deux arêtes K et sur l’arête L, lesquelles, si la charge est forte, s’épaufreront de telle sorte, que le segment KK ne portera plus. Mais si cet arc de décharge a été construit ainsi que ceux du Panthéon (voy. en A), et que l’écartement ait lieu dans les culées (voy. en C), les trois arcs extradossés s’infléchiront, s’ouvriront, et les charges se répartiront sur six arêtes d’intrados en M et trois arêtes d’extrados en N, à la clef. Les angles de brisures seront moins allongés et le désordre moins considérable que dans l’exemple B. On comprend donc pourquoi ces arcs de brique sont toujours extradossés dans leur partie supérieure, c’est-à-dire dans la partie qui porte la charge ; c’était pour conserver une certaine élasticité que ne pouvaient avoir des arcs homogènes dans leur épaisseur. Ce principe appuyé sur l’observation, si simple d’ailleurs, mais si peu suivi dans l’architecture moderne, était, à plus forte raison, appliqué aux coupoles d’un grand diamètre.

Conformément à la méthode expliquée dans la figure 1 et par les raisons données plus haut, il était nécessaire qu’une coupole comme celle du Panthéon fût rapidement ébauchée, pour ainsi dire, sur ces cintrages, que les Romains tenaient à faire légers et avec des bois courts autant que