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par un comble conique, et au-dessus du passage voûté de la porte est une salle carrée, avec cheminée, cabinets et escalier montant aux chemins de ronde des mâchicoulis.

Le célèbre château de Montargis possédait une tour-porte construite à peu près suivant ce programme, mais développé. Nous en présentons les plans (fig. 76)[1]. En A, est tracé le plan du rez-de-chaussée. Un pont-levis s’abattait en a, sur une chaussée ; b était un large fossé ; d, la courtine isolée de la tour ; e, la grande salle crénelée[2] ; f, un second pont-levis, de sorte que la tour pouvait être complétement isolée des dehors et de la cour du château g.

Quand on avait franchi la première porte a, on se trouvait dans une cour cylindrique, sorte de puits à ciel ouvert, n’ayant d’autre issue que la porte f vers la cour. Au premier étage B, la tour était mise en communication avec la courtine d au moyen d’une passerelle de bois aboutissant à un petit poste h. Par deux couloirs réservés dans l’épaisseur du cylindre, on arrivait aux deux chambres de herses, et l’on trouvait en face de la passerelle un escalier à vis montant à l’étage supérieur de la défense, dont le plan est figuré en C. Cet étage ne consistait qu’en une galerie annulaire crénelée à l’extérieur et à l’intérieur, afin de permettre aux défenseurs d’écraser les assaillants qui se seraient aventurés dans la cour circulaire.

Du rez-de-chaussée on ne pouvait monter aux étages supérieurs. De petits postes étaient probablement ménagés dans l’épaisseur du cylindre, entre l’étage des chambres de herses et la galerie de couronnement. La figure 77 présente la coupe de cette tour, faite sur l’axe des portes en A, et le détail de la galerie supérieure en B. Nous ne saurions dire si cet ouvrage était antérieur ou postérieur aux défenses faites dans l’Ouest sous les ordres du connétable de Clisson ; mais il est certain qu’il appartient au même ordre de défenses.

Nous avons montré, dans l’article Pont, des tours destinées à défendre ces passages : les unes sont carrées, comme celles du pont de Cahors ; d’autres sont circulaires ou elliptiques, comme la grosse tour du pont de Saintes. Il est donc inutile de nous étendre plus longtemps ici sur ces tours à cheval sur des passages. Il nous reste à dire quelques mots des tours-phares. Une des plus anciennes est la tour d’Aigues-Mortes, dite tour de Constance, bâtie par saint Louis. Cette tour cylindrique a 29 mètres de hauteur sur 22 mètres de diamètre ; une tourelle de 11 mètres s’élève près du crénelage sur la plate-forme, et portait les feux de nuit destinés à guider les navires entrant dans le port. Cette plate-forme est disposée pour recevoir les eaux pluviales qui s’écoulent dans une citerne. Deux salles voûtées sont pratiquées sous le crénelage et ne sont éclairées que par des meurtrières.

  1. Voyez du Cerceau, Les plus excellens bastimens de France.
  2. Voyez Salle.