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lain et quelques fidèles, les ponts coupés, les herses baissées, les portes et fenêtres barricadées, enclos dans ce dernier refuge, se défendaient à outrance jusqu’à ce que les vivres vinssent à manquer.

Ce système de réduit, propre à une défense extrême, est adopté d’une manière absolue dans la grosse tour éventrée du château de Montépilloy, près de Senlis. D’un côté, cette tour donnait sur la baille du château, de l’autre sur le château lui-même, qui avait peu d’étendue[1]. Nous parlons ici du château tel qu’il existait au XIIe siècle avant les adjonctions et modifications que lui fit subir Louis d’Orléans.

Nous donnons (fig. 43) le plan du premier étage de cette tour, au niveau duquel s’ouvrait la seule poterne donnant entrée dans l’intérieur. En A est la porte qui permet de descendre, par un escalier voûté, dans l’épaisseur du cylindre, à l’étage inférieur ; en B, la porte qui, par un long degré, également voûté, donne accès au second étage en C, et à la chambre D de la herse et du mâchicoulis de la poterne. En continuant l’ascension par le degré, on arrive au troisième étage. La poterne P est donc relevée au-dessus du sol extérieur de toute la hauteur du rez-de-chaussée. On n’y arrive que par une passerelle de bois facile à détruire. Cette poterne était fermée au moyen d’une grille, d’une herse, d’un mâchicoulis et d’un vantail barré. Une petite chambre E, propre à contenir deux hommes, est percée d’une meurtrière oblique qui enfile le tablier de la passerelle. Ce tablier était percé d’une trappe, par laquelle, au moyen d’une échelle, on descendait, défilé par la pile du pont, sur le chemin de ronde de la chemise G. L’intervalle entre cette chemise et la tour formait donc comme un fossé[2].

La coupe faite sur ab (fig. 44) montre en A la tour de Montépilloy telle qu’elle existait au XIIe siècle, et en B avec les modifications qui furent apportées aux défenses, en 1400, dans les parties supérieures[3]. On voit en C la coupe de la chemise, en P la coupe de la poterne, et en D celle de la chambre de la herse et du mâchicoulis au-dessus de cette poterne. On observera que le rez-de-chaussée est voûté, ainsi que l’étage au-dessus, au moyen d’arcs ogives à section rectangulaire reposant sur cinq piles. Cette salle voûtée supérieure est divisée par un plancher, c’est le second étage. Le troisième étage, dans lequel on débouche par la porte I, est resté tel qu’il était au XIIe siècle, seulement au XVe siècle on entailla sa muraille sur un point pour y loger un escalier

  1. Ce château, qui dépendait du Valois, fut rebâti en partie par Louis d’Orléans, quand ce prince fortifia son duché pendant la maladie de Charles VI. Le château de Montépilloy, situé sur une hauteur, commandant la route de Senlis à Crespy, servit de point d’appui aux armées des partis qui manœuvrèrent dans cette contrée pendant les guerres du XVe et du XVIe siècle. Il fut démantelé après l’entrée de Henri IV à Paris.
  2. Plus tard Louis d’Orléans fit détruire une partie de cette chemise, et bâtir une courtine en F, laquelle enfermait les nouveaux ouvrages.
  3. Pour plus de clarté, nous n’avons pas présenté la passerelle avec ses piles en coupe, mais en élévation latérale.