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édifice se compose d’un rez-de-chaussée avec épine de piliers supportant un plancher, et d’une grand’salle dont le plafond est soutenu par des arcs de maçonnerie. La figure 9 donne en A le plan de cette grande salle, en B son élévation extérieure sur le dehors du palais, et en C sa coupe transversale. Cette salle était crénelée dans ses œuvres hautes sur le dehors et sur la cour. Des murs d’une forte épaisseur l’épaulaient entre les baies, mais l’étage supérieur au-dessus de la grand’salle n’était plus maintenu que par des murs peu épais, avec petits contre-forts destinés à contre-buter les murs de refend qui supportaient les pannes du comble, et formaient ainsi une suite de pièces éclairées par de petites fenêtres. C’est un des rares exemples d’une grand’salle surmontée de logements.

La grand’salle est donc la partie la plus importante des châteaux et palais ; c’est chez le seigneur féodal, le signe de sa juridiction, le lieu où se rend l’hommage, où se réunissent les vassaux, où l’on rassemble les défenseurs en cas de siège, où se tiennent les plaids, où se donnent les banquets, les ballets, les mascarades, les fêtes de toute sorte. Il n’y a pas de château féodal, ni même de manoir, qui n’ait sa salle. Le bourgeois de la ville, dans sa maison, possède aussi sa salle où il réunit sa famille, ses amis, où il prend ses repas et reçoit les gens qui traitent d’affaires. Quand les cités purent élever des hôtels de ville, il va sans dire que ces bâtiments contenaient la salle de la commune. Le programme est le même du petit au grand.

Cette tradition se conserva très-tard dans les châteaux, quand même ces résidences n’avaient plus le caractère de places fortes. Ainsi, à Fontainebleau, la galerie dite de Henri II est une tradition de la grand’salle du château féodal. Cette belle galerie, comme beaucoup de salles de châteaux féodaux, donne entrée sur la tribune de la chapelle. À Saint-Germain en Laye, on voit encore la grand’salle voûtée qui occupe tout un côté des bâtiments. À Versailles même, la galerie de marbre n’est que la tradition de la grand’salle des résidences seigneuriales.

Les monastères possédaient aussi des logis qui prenaient le nom de salles. Il ne s’agit point ici des réfectoires, dortoirs et bibliothèques, qui étaient de véritables salles par leur structure, sinon par leur destination, mais des salles propres à réunir les religieux pour traiter des affaires du couvent. Ce sont les salles capitulaires. Ces locaux, plus ou moins vastes, suivant l’étendue du monastère, ont un caractère particulier. Les salles capitulaires sont rarement oblongues, cette forme ne se prêtant pas aux délibérations, mais plutôt carrées, sur le sol français du moins, car en Angleterre il existe des salles capitulaires sur plan circulaire ou polygonal, avec pilier au centre pour recevoir les retombées d’arcs des voûtes. Les salles capitulaires des monastères français s’ouvrent sur le cloître, et proche de l’église habituellement. Il nous suffira, pour ne pas donner à cet article plus d’étendue qu’il ne convient, de présenter un exemple très-complet de l’une de ces salles capitulaires, dépendant de