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raient largement les deux nefs lambrissées en berceau, avec en traits et poinçons apparents.

Ces lambris, ainsi que les piliers et statues des rois, étaient peints et dorés[1]. Corrozet[2] nous a conservé le catalogue des rois dont les effigies décoraient les piliers isolés ou adossés.

Des supports avaient été réservés pour les successeurs de Philippe le Bel, puisque ce même Corruzet nous donne quarante-deux noms jusqu’à ce prince, et depuis, onze rois dont les statues ont été posées après la construction de la salle. Il annonce en outre que les statues des rois François Ier, Henri II, François II et Charles IX doivent être prochainement montées sur leurs supports vides. Il y avait donc place pour cinquante-sept statues. En effet, nous trouvons cinquante-cinq supports. Louis XI ayant fait enlever deux de ces statues pour les loger aux deux côtés de la chapelle élevée par lui, Charlemagne et saint Louis, le nombre donné par Corrozet est conforme aux indications du plan, car on observera qu’il n’existait pas de statues aux deux angles O, non plus que sur le trumeau de la porte G. Des bancs de pierre étaient disposés latéralement dans les renfoncements formés par les allèges des fenêtres. Notre figure 6 donne en A une travée double le long des murs de la salle, et en B une travée des piliers de l’épine.

La salle du palais de Paris était élevée d’après un programme qui ne touchait en rien à la défense de la place. Lorsqu’elle fut bâtie, en effet, il n’était plus question de considérer le palais comme un château fortifié propre à la défense. Le palais n’était plus au XIVe siècle qu’une demeure souveraine et le siège du parlement. Cependant les dispositions féodales sont encore apparentes ici ; la salle basse conserve sa disposition secondaire, n’ayant de communication qu’avec les cours, tandis que de la salle haute on pouvait se rendre aux galeries, à la sainte Chapelle et aux appartements.

Mais si nous jetons les yeux sur le plan de la grand’salle du château de Coucy, salle qui fut reconstruite par Louis d’Orléans pendant les premières années du XVe siècle, nous voyons que le programme du château

    Où les jours maigres on oyt diverses voix,
    Haute un Barbeau et s’y tient par coutume,
    Groz, bien nourry, du lez de Gastinois,
    Qui vit de cry et se nourrist de plume. »

    (Le Testament de la mule Barbeau.)

    Ce « vieil cerf » était un modèle de bois d’un cerf qui devait être fait en or fin pour le trésor du roi, lequel modèle avait été déposé dans la grand’salle. Quant à la « grand lizarde », c’était probablement un crocodile empaillé déposé dans le même lieu, comme objet de curiosité. La table de marbre était, semble-t-il, revêtue d’une estrade de bois, destinée aux « momeries » des clercs de la basoche.

  1. Voyez Sauval, t. II, p. 3.
  2. Antiquités de Paris, p, 99.