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core en France. Nous citerons celles de l’église de Flavigny (Côte-d’Or), dont les dais sont en forme de voussure ; de l’ancienne abbaye de Saint-Claude (Jura), aujourd’hui cathédrale, qui remontent au XVe siècle. Ces dernières sont datées et signées ; elles ont été faites par Jehan de Viéry, en 1455. Exécutées grossièrement, elles sont cependant assez bien composées. Mutilées à plusieurs reprises, des statuettes, certaines parties manquent aux jouées.

Voici, fig. 5, la face et le profil des formes hautes. Les grands panneaux du dorsal sont décorés de figures bas-reliefs représentant des prophètes, des sibylles. Des figurines ronde bosse surmontent les colonnettes à section octogone qui séparent ces panneaux. D’autres statuettes sont posées sur les fleurons espacés de la petite galerie ajourée supérieure. Les dais se composent d’une succession de petits voûtains en berceau perpendiculaires au dorsal.

La figure 6 montre l’une des jouées des formes hautes et basses, avec l’entrée entre elles deux[1]. Les bas-reliefs se détachent sur des fonds pleins ou ajourés ; des statuettes décorent richement, trop richement même, ces jouées. En B, est tracé le profil des stalles basses. Malgré la profusion des détails, dans cette figure comme dans la précédente, le principe de la structure de bois est toujours apparent. Mais dans leurs compositions les plus riches, jamais les artistes du moyen âge n’ont failli à ce principe, qu’il s’agisse de la maçonnerie, de la charpente, de la serrurerie ou de la menuiserie. On ne saurait trop étudier les assemblages de ces grands ouvrages de menuiserie du XVe siècle et du commencement du XVIe, alors que les traditions gothiques n’étaient pas encore perdues. Sous une apparence très-compliquée, la structure est toujours simple et conçue en raison de la qualité de la matière. Les stalles du chœur de la cathédrale d’Amiens, par exemple, qui sont chargées d’une quantité prodigieuse de détails, présentent une structure de bois très-bien combinée et très-simple. Ces stalles sont aujourd’hui au nombre de cent seize[2] ; elles furent commencées en 1508 et achevées en 1522 par deux maîtres menuisiers, Alexandre Huet et Arnoult Boullin, sous la direction de Jean Turpin, et par le tailleur d’ymages Antoine Avernier. La dépense totale s’éleva à 11 230 livres 5 sols[3].

Le bois de chêne employé est d’une excellente qualité, et ne laisse voir sur aucun point la trace de piqûres de vers. Les formes hautes des extrémités sont couronnées de clochetons très-élevés, ajourés, couverts de détails délicats, de figurines, taillés avec une précision et une souplesse de ciseau remarquables. Tous les détails qui couvrent les montants, les

  1. Sur notre figure, le couronnement A est dessiné à côté de sa place et se rapporte en A′.
  2. Trente-deux en haut et vingt-six, en bas de chaque côté. Il en existait quatre de plus avant la destruction du jubé en 1755.
  3. Ces stalles coûteraient aujourd’hui plus de 500 000 francs.