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leur tendent l’évêque et l’abbé de Saint-Sernin. Ils viennent à composition, livrent des otages, et le comte met la ville au pillage, la détruit presque entièrement.

Bientôt le jeune comte Raymond reparaît sur la scène, et rentre la nuit dans sa ville. Le peuple, plein de joie de recouvrer son seigneur légitime, massacre les postes français. Cependant il n’y a plus à Toulouse ni tour, ni galeries, ni murs, ni bretêches, ni portes, ni barrières, ni armes. Les Français se sont réfugiés au château Narbonnais, dont ils n’osent sortir, tant ceux de la ville se rendent redoutables. La comtesse de Montfort est enfermée dans le château, avec son fils, car le comte guerroie en Provence. Elle lui envoie un messager ; s’il tarde à venir, il perdra à la fois Toulouse, sa femme et son fils.

Les hommes de Toulouse occupent la ville ; ils élèvent des barrières, forment des lices, des traverses, des hourds avec archères, des passages obliques bien défilés. Tous, bourgeois, manants, valets, femmes, filles, enfants et serviteurs, travaillent à l’envi à fortifier la ville, creusant des fossés, élevant des palissades et des bretêches. Des flambeaux la nuit éclairaient les ouvriers. Les clochers des églises sont crénelés. Le comte désigne des capitouls pour gouverner la ville.

Gui de Montfort, le frère du comte Simon, arrive bientôt avec une nombreuse troupe. Il se présente au val de Montolieu, là où les murs anciens ont été rasés. « À terre, francs chevaliers ! » crie-t-il aux siens. Aussitôt, abandonnant leurs chevaux, coupant leurs lances, les chevaliers attaquent les gens de Toulouse ; ils pénètrent jusqu’au milieu de la ville. Mais assaillis de tous côtés, accablés sous les tuiles que l’on fait crouler sur leurs têtes, embarrassés dans les barricades, éperdus, séparés, les hommes d’armes de Gui, ayant laissé bon nombre des leurs par la ville, se retirent au jardin de Saint-Jacques, ayant abandonné leurs bagages.

Arrivent de tous côtés des renforts aux Toulousains. Le comte Raymond exhorte ses barons « aux fatigues, aux privations, aux travaux, aux guets, aux taches communes ».

Devant la garnison enfermée dans le château Narbonnais s’élèvent comme par enchantement, des remparts, des tours ; se creusent des fossés avec palissades de pieux aigus. Sur ces entrefaites, le comte de Montfort arrive de Provence, plein de rage, et jurant de faire de Toulouse un désert.

La ville de Toulouse, bâtie sur la rive droite de la Garonne, était reliée par un pont au pays de Gascogne, de Comminges et de Foix.

Son périmètre n’avait pas l’étendue qu’il acquit depuis lors. Vers le nord, l’enceinte s’appuyait à un ouvrage bâti sur la Garonne, et qui s’appelait le Bazacle ou la tour du Bazacle ; se dirigeait vers l’est en passant par la place du Capitole actuel, et retournait vers le sud en longeant l’abside de l’église cathédrale de Saint-Étienne ; descendait au sud-ouest, suivant la rue Mountoulieu actuelle ; puis, à la hauteur de