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[serrurerie]
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l’église d’Ebreuil est assez remarquable. Chaque vantail n’est suspendu que par deux pentures ; sept fausses pentures garnissent les frises et les maintiennent entre elles. La fausse penture du milieu, plus riche que les six autres, forme une double palmette d’un beau caractère. Ces ferrures sont posées sur des peaux marouflées sur le bois et peintes en rouge vif. Deux anneaux attachés à des mufles de lion de bronze facilitent le tirage des vantaux.

L’art de souder le fer au marteau arrivait déjà, au commencement du XIIe siècle, à une grande perfection. Les exemples abondent, et nous n’avons que l’embarras du choix. Quand il s’agit seulement de souder à une branche principale des rameaux secondaires, la besogne n’est pas très-difficile pour un forgeron habile ; mais si l’on prétend réunir des rinceaux à un centre, composer des sortes d’entrelacs, le travail exige une grande pratique et une main aussi leste qu’habile. Ces fausses pentures, par exemple, provenant de la porte de l’église de Neuvy-Saint-Sepulcre (fig. 4) présentent un travail de forge d’une difficulté réelle. Pour obtenir les soudures A et B, surtout celles A, l’ouvrier, s’il n’est très-adroit, risque fort de brûler son fer, car il lui faut remettre la pièce au feu plusieurs fois, et cela sur un seul point. Il commence par forger et souder une pièce C à laquelle il soude les huit branches l’une après l’autre ; or, la branche a étant soudée, s’il veut souder celle b, il faut que son feu et son soufflet soient dirigés seulement sur le bout b, sans chauffer au rouge la pièce a. Pour les soudures B, les deux branches E, G, étant forgées, on les chauffait toutes deux en g, puis on les battait pour les souder ensemble sur une doublure h (voyez cette doublure ornée h, préparée avant la soudure). Nous verrons tout à l’heure avec quelle adresse les forgerons arrivèrent, à la fin du XIIe siècle, à façonner des pièces bien autrement compliquées. Les extrémités des branches sont enroulées, ainsi que le montre le tracé H, de manière à laisser un œil pour passer la tige du clou à tête carrée p.

Mais ces sortes de pentures étaient assez riches d’ornementation déjà, et exigeaient un grand nombre de soudures, car tous ces bouquets devaient être forgés à part et soudés aux tiges principales. On employait souvent un procédé plus simple, et qui cependant permettait une ornementation assez brillante. Ce procédé consistait à détacher certaines parties d’une bande de fer à chaud, et à leur donner un galbe particulier. Ainsi (fig. 5) soit une bande de fer plat A : on fendait à chaud, le long de ses rives, des languettes de fer a ; on courbait à chaud cette bande de fer sur son champ, ainsi que l’indique le tracé B, puis on galbait chacune des brindilles refendues, en volutes a′. L’œil de chacune de ces volutes était destiné à laisser passer une tige de clou c dont la tête pressait les bords du fer (voyez en b). On soudait alors la branche courbe, en D, à la bande droite de la penture.

Cet exemple provient d’une porte de l’église de Blazincourt (Gironde), et date du XIIe siècle. Les bouts E des branches courbes se terminent en