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moderne de ces lois si simples, et chaque jour nous voyons les artistes eux-mêmes être fort surpris qu’une élévation bien mise en proportion en géométral, ne produise plus, à l’exécution, l’effet auquel on s’attendait.

Dans le cours de cet ouvrage, nous avons eu maintes occasions de présenter des tracés de profils, nous ne croyons donc pas nécessaire de nous étendre plus longtemps sur cet objet. Ce que nous tenions à démontrer ici, c’est que le hasard ou la fantaisie n’ont été pour rien dans le tracé des profils de l’architecture du moyen âge, que ceux-ci sont soumis à des lois établies par les nécessités de la structure et sur une entente judicieuse des effets.

PROPORTION, s. f. Les Grecs avaient un mot pour désigner ce que nous entendons par proportion : συμμετρἰα, d’où nous avons fait symétrie, qui ne veut nullement dire proportion ; car un édifice peut être symétrique et n’être point établi suivant des proportions convenables ou heureuses. Rien n’indique mieux la confusion des idées que la fausse acception des mots ; aussi ne s’est-on pas fait faute de confondre dans l’art de l’architecture, depuis le XVIe siècle, la symétrie, ou ce qu’on entend par la symétrie, avec les rapports de proportions ; ou plutôt a-t-on pensé souvent satisfaire aux lois des proportions en ne se contentant que des règles de la symétrie.

L’artiste le plus vulgaire peut adopter facilement un mode symétrique ; il lui suffit pour cela de répéter à gauche ce qu’il a fait à droite, tandis qu’il faut une étude très-délicate pour établir un système de proportions dans un édifice, quel qu’il soit. On doit entendre par proportions, les rapports entre le tout et les parties, rapports logiques, nécessaires, et tels qu’ils satisfassent en même temps la raison et les yeux. À plus forte raison, doit-on établir une distinction entre les proportions et les dimensions. Les dimensions indiquent simplement des hauteurs, largeurs et surfaces, tandis que les proportions sont les rapports relatifs entre ces parties suivant une loi. « L’idée de proportion, dit M. Quatremère de Quincy dans son Dictionnaire d’Architecture, renferme celle de rapports fixes, nécessaires, et constamment les mêmes, et réciproques entre des parties qui ont une fin déterminée. » Le célèbre académicien nous paraît ne pas saisir ici complètement la valeur du mot proportion. Les proportions, en architecture, n’impliquent nullement des rapports fixes, constamment les mêmes entre des parties qui auraient une fin déterminée, mais au contraire des rapports variables, en vue d’obtenir une échelle harmonique. M. Quatremère de Quincy nous semble encore émettre une idée erronée, s’il s’agit des proportions, lorsqu’il ajoute :

« Ainsi il est sensible que toutes les créations de la nature ont leurs dimensions, mais toutes n’ont pas des proportions. Une multitude de plantes nous montrent de telles disparates de mesures, de si nom-