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En parlant des portes principales des églises, nous avons dit que, dans la province de Champagne particulièrement, on signalait un assez grand nombre de portes dont les tympans sont à claire-voie. Telles sont composées les portes occidentales de la cathédrale de Reims. On voit également, dans cette province, des portes secondaires d’églises dont le linteau est surmonté d’une véritable fenêtre formant un ensemble avec la baie inférieure. L’église de Saint-Urbain de Troyes nous fournit encore un exemple de ces sortes de baies ouvertes sur les deux collatéraux[1]. Ces portes étaient précédées d’un porche qui ne fut pas achevé. La figure 82 donne l’une d’elles ; une grande fenêtre vitrée surmonte le linteau ; l’arc en tiers-point de cette fenêtre sert de formeret à la voûte du porche, dont les arêtes reposent sur les deux colonnettes A (voy. la coupe B). Les pieds-droits de la porte, les linteaux, les meneaux et arcs de la fenêtre, sont élevés en liais de Tonnerre, tandis que les parements sont construits en assises basses de pierre de Bassancourt, assez grossière d’aspect, mais résistante. En C, nous donnons la section du pied-droit, faite sur ab.

Dans la composition de ces portes d’églises surmontées de claires-voies, les architectes champenois semblent avoir voulu non-seulement percer des jours partout où cela était praticable, mais surtout décorer intérieurement les tympans de portes dont la nudité, au revers des bas-reliefs, contraste avec la richesse extérieure. C’était, s’il ne s’agissait que de portes secondaires, un moyen d’éclairer les voûtes des collatéraux sous les tours des façades, d’obtenir un effet analogue à celui que produisent les grandes claires-voies avec roses, percées au-dessus des portes principales des hautes nefs.

À la cathédrale de Chartres, par exemple, les portes du transsept, au nord et au midi, sont merveilleusement sculptées à l’extérieur ; leurs tympans, leurs voussures, leurs pieds-droits, sont couverts de statues, de bas-reliefs et d’ornements ; mais à l’intérieur elles ne présentent à la base des pignons que des surfaces unies, à peine rehaussées de cordons indiquant les arcs : ce ne sont que des revers qui semblent attendre une décoration. Peut-être les architectes de ces grands édifices devaient-ils orner ces revers par des tambours de menuiserie et par des peintures, mais il ne reste pas trace aujourd’hui de ces dispositions. Ce qui nous porterait à supposer que des tambours devaient être adossés à ces revers de portes, c’est que souvent les pieds-droits ou les trumeaux présentent des saillies, comme des pilastres en attente. En Champagne, des tambours devaient certainement fermer les ébrasements intérieurs des grandes et moyennes portes d’églises. L’épaisseur de ces ébrasements, calculée pour permettre de développer les vantaux sans affleurer le parement intérieur, suffirait pour le démontrer, si le plan de l’église Saint-Nicaise de Reims ne prouvait pas de la manière la plus positive

  1. Voyez le plan de l’église de Saint-Urbain à l’article Construction, fig. 102.