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s’ouvrant sur le collatéral sud, est composée en grande partie avec des fragments provenant d’une porte du XIIe siècle, ainsi que nous l’avons expliqué plus haut. La porte centrale, élevée en même temps que celle de la Vierge, fut remaniée peu après, nous ne savons pour quelle raison, car nous avons découvert dans les fouilles des fragments d’un tympan primitif provenant du Christ et des figures qui l’entouraient. En effet, cette porte centrale paraît, par son style, être postérieure de quelques années à la porte de gauche. Celle-ci, dite de la Vierge, appartient aux premières constructions de la grande façade, et fut élevée par conséquent de 1205 à 1210. C’est une des plus belles conceptions de l’art du moyen âge, soit comme architecture, soit comme ornementation, soit comme statuaire. Elle est construite entièrement en matériaux de choix, liais-cliquart de la butte Saint-Jacques.

Si l’on jette les yeux sur le plan de la cathédrale de Paris (voy. Cathédrale, fig. 1), on observera que cette porte de gauche s’ouvre sous la tour, comme celle de droite, dans une salle voûtée au moyen d’arcs ogives croisés d’arcs-doubleaux, de sorte que l’un de ces arcs-doubleaux repose sur le trumeau de la baie double, et que les deux vantaux étant ouverts, ces deux baies donnent en face des deux bas côtés.

Le plan de la porte de la Vierge, (fig. 67) présente donc une disposition particulière, très-largement conçue. En A, ce plan donne la section horizontale au niveau des soubassements décorés d’une arcature. En B, au niveau des statues qui surmontent ce soubassement et qui reposent sur une large saillie, l’ordonnance des colonnettes qui séparent les statues est telle, que ces colonnettes a sont plantées sur l’axe b des arcs du soubassement, et qu’alors les statues reposent sur les colonnettes inférieures c. C’est sur la grosse colonne D que porte l’arc-doubleau d recoupant les arcs ogives. Dans l’origine, l’espace DE était vide ; mais des écrasements s’étant produits dans la colonne D, cet espace fut rempli en pierres de taille, peu après la construction, ainsi que l’indiquent les lignes ponctuées g, de façon à réunir cette colonne au trumeau.

La figure 68 présente l’élévation de cette porte, qui est tout un poëme de pierre. Sur le socle du trumeau central est placée la statue de la Vierge tenant l’enfant ; sous ses pieds elle foule le dragon à tête de femme, dont la queue s’enroule au tronc de l’arbre de la science. Adam et Ève, des deux côtés de l’arbre, sont tentés par le serpent. Sur la face gauche du socle, est sculptée la création d’Ève, et sur celle de droite, l’ange chassant nos premiers parents du paradis. Un dais très-riche, soutenu par deux anges thuriféraires, surmonte la tête de la Vierge et se termine par un charmant édicule recouvrant l’arche d’alliance. On voudra bien se rappeler que les litanies donnent à la Vierge le titre d’Arche d’alliance. Ainsi, sur ce trumeau, la glorification de la mère du Christ est complète. Elle tient dans ses bras le Rédempteur ; suivant la parole de l’Écriture, elle écrase la tête du serpent, et sa divine fonction est symbolisée par l’arche d’alliance. Sur le linteau de la porte, divisé en deux parties par