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analogue à celle de Vézelay, mais sa sculpture, bien que d’une époque un peu plus récente, n’a pas un caractère aussi puissant. La composition manque d’ampleur et d’originalité. À Autun, cette double ordonnance des pieds-droits et du trumeau n’existe plus ; les colonnettes s’élèvent jusqu’au niveau du linteau. Les profils sont maigres, la statuaire plate et sans effet. Cependant la porte de la cathédrale d’Autun est encore une œuvre remarquable. On peut en saisir l’ensemble sur la figure 13 de l’article Porche.

Parmi les portes d’églises du XIIe siècle, les plus remarquables, il faut citer aussi celle de Moissac. Cette porte s’ouvre latéralement sur le grand porche dont nous avons donné le plan figure 24, à l’article Porche. Elle est élevée sous un large berceau qui forme lui-même avant-porche et qui est richement décoré de sculptures en marbre gris. Son trumeau est couvert de lions entrelacés qui forment une ornementation des plus originales et d’un grand effet. Les pieds-droits se découpent en larges dentelures sur le vide des baies, et le linteau présente une suite de rosaces circulaires d’un excellent style[1]. Dans le tympan, est assise une grande figure du Christ bénissant, couronné ; autour de lui sont les quatre signes des évangélistes, deux anges colossals, et les vingt-quatre vieillards de l’Apocalypse. Les voussures ne sont remplies que par des ornements. Mais, sur les jambages du berceau formant porche, sont sculptés, à la droite du Christ, les vices punis ; à la gauche, l’annonciation, la visitation, l’adoration des mages et la fuite en Égypte.

Il nous serait difficile de présenter les exemples les plus remarquables des portes d’églises du moyen âge. Une pareille collection nous entraînerait bien au delà des limites de cet ouvrage. Nous devons chercher au contraire à circonscrire notre sujet, à donner quelques types principaux, et surtout à étudier les progrès successifs des écoles diverses qui ont abouti aux œuvres magistrales du XIIIe siècle. Il n’est pas besoin d’être fort versé dans l’étude de nos anciens monuments, pour reconnaître que les portes principales des églises en France présentent une variété extraordinaire dans leur disposition et leur ornementation, tout en se conformant, par leur structure, à un principe invariable. Ainsi, les portes principales, c’est-à-dire qui possèdent de larges baies, se composent toujours d’un arc de décharge sous lequel est posé le linteau, et un remplissage, qui est le tympan. Si ces portes doivent donner accès à la foule, dès le XIIe siècle, elles se divisent en deux ouvertures séparées par un trumeau. Ce trumeau reçoit le battement des deux vantaux et soulage le linteau au milieu de sa portée. C’est là une disposition qui appartient à notre architecture du moyen âge, et qui ne trouve pas d’analogues dans l’antiquité. La porte principale de l’église abbatiale de Vézelay, que nous

  1. Cette ornementation a été estampée et est bien connue des artistes. C’est un des plus beaux exemples de la sculpture du moyen âge, et qui peut rivaliser avec les œuvres de l’antiquité grecque.