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suivant une ligne oblique, en se couvrant par des mantelets, des épaulements et des galeries de bois, contre les projectiles des courtines ; laissant les barbacanes dont ils occupaient les défenseurs par des attaques rapprochées, ils les prenaient latéralement, et arrivaient ainsi à la base des tours des portes, au point le plus difficile à défendre[1]. C’était en prévision de ce genre d’attaque que les constructeurs militaires faisaient ces becs saillants, ces éperons renforçant les tours des portes au point attaquable et obligeant l’assaillant à s’éloigner de la tangente ; mais dès l’instant que l’on pouvait munir les couronnements des tours de machines de jet à longue portée, ce moyen de défense rapprochée devenait superflu.

Une coupe faite suivant l’axe du passage de la porte de Villeneuve-lez-Avignon (fig. 26), complétera l’intelligence de ce bel ouvrage d’un aspect vraiment imposant. Cette coupe B indique la coulisse de la première herse en C, les premiers vantaux en f, la coulisse de la seconde herse en D et les seconds vantaux en e. On observera que, conformément à l’usage admis, autant que la configuration du terrain le permettait, le sol du passage s’élève de l’extérieur à l’intérieur. Au-dessus du passage, se voit la chambre de manœuvre des deux herses, et au-dessus de cette salle le châtelet supérieur, surmonté d’un engin à longue portée. Devant la seconde herse D, s’ouvre un mâchicoulis. La figure A donne la coupe transversale du passage fait sur ab en regardant du côté de l’entrée. En E, sont encore scellés les trois anneaux de fer, de 0m,25 de diamètre, qui servaient à suspendre les poulies nécessaires à la manœuvre des chaînes de la première herse.

Mais la place de Villeneuve-lez-Avignon est située sur une colline de roches abruptes, et sa porte s’ouvre en face d’un contre-fort descendant vers la plaine. Dans une pareille situation, il n’est besoin ni de fossés, ni d’ouvrages avancés très-forts, car l’assiette du lieu offre déjà un obstacle difficile à vaincre. La circulation des allants et venants se borne à des sorties et à des rentrées d’une garnison. La porte que nous venons de présenter ci-dessus est donc plutôt l’entrée d’un château que d’une ville populeuse et dont les issues doivent être laissées libres tout le jour. Les portes de la ville d’Avignon étaient bien, au XIVe siècle, des ouvrages disposés pour une cité fortifiée, mais contenant une population nombreuse et active.

Les remparts d’Avignon furent élevés de 1348 à 1364. Ils étaient percés, soit du côté du Rhône, soit du côté de la plaine, de plusieurs portes, parmi lesquelles nous choisirons la porte Saint-Lazare, l’une des mieux conservées et sur laquelle nous possédons des documents complets[2].

  1. Voyez l’article Siége.
  2. C’est à l’obligeance de M. Achard, le savant archiviste de la préfecture de Vaucluse, que nous devons la plus grande partie des renseignements qui nous ont aidé à restituer cette porte dans son état primitif.