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sions, des reliques et de saintes images. « Les porches des églises, dit Thiers, sont des lieux saints : 1o à cause des reliques ou des images qui y sont ; 2o à cause qu’ils sont le lieu de la sépulture des fidèles ; 3o à cause qu’ils sont destinés à de saints usages ; 4o à cause qu’ils font partie des églises ; 5o à cause qu’ils sont ainsi appelés par les conciles et par les auteurs ecclésiastiques[1]. »

Guillaume Durand observe « que le porche de l’église signifie le Christ par qui s’ouvre pour nous l’entrée de la Jérusalem céleste ; il est appelé aussi portique (porticus), de la porte (a porta), ou de ce qu’il est ouvert à tous comme un port (a portu)[2]. »

Toutefois les porches des églises ne conservèrent pas toujours, pendant le moyen âge, ce caractère sacré ; nous en avons la preuve dans les réclamations des chapitres ou des religieux au sujet des usages profanes auxquels on les faisait servir. Dans le recueil des arrêts du parlement de 1292, nous trouvons une plainte du doyen et du chapitre de Roye contre le châtelain, lequel tenait depuis longtemps ses plaids sous le porche de l’église. Il est enjoint au bailly de Vermandois de défendre audit châtelain de tenir à l’avenir ses assemblées dans ce lieu, nonobstant qu’il les y eût tenues depuis longtemps, s’il est bien constaté que ce porche fait partie de l’église et sert de cimetière[3].

C’est probablement pour prévenir ces abus que les grands établissements de Cluny et de Cîteaux élevèrent devant leurs églises des porches absolument fermés dès le commencement du XIIe siècle ; d’ailleurs ces porches devaient servir à des cérémonies ou à des usages qui nécessitaient une clôture, comme nous le verrons bientôt. Quantité de porches d’églises cathédrales et paroissiales servaient même de marchés, et les auteurs ecclésiastiques élèvent trop souvent contre cet abus pour qu’il n’ait pas été fréquent. Encore aujourd’hui voyons-nous qu’on y établit des boutiques volantes, en certains lieux, les jours de foire, et que des chapitres y tolèrent la vente d’objets de piété.

Les porches primitifs du moyen âge, en Occident, c’est-à-dire ceux bâtis du VIIIe au XIe siècle, se présentent généralement sous la forme d’un portique tenant toute la largeur de l’église et ayant peu de profondeur. Cependant certains porches d’églises dépendant de monastères ou même de collégiales sont disposés sous une tour plantée devant la nef. Tel était le porche de l’église abbatiale de Saint-Germain des Prés à Paris, dont il ne reste que bien peu de traces, et qui datait de l’époque carlovingienne ; tels sont encore ceux de l’église abbatiale de Saint-Savin près Poitiers, de la cathédrale de Limoges et de la collégiale de Poissy, qui tous trois appartiennent aux IXe et Xe siècles. Alors ces porches formaient une entrée défendue, et étaient quelquefois précédés d’un fossé, comme celui de

  1. Dissert. sur les porches des églises…, chap. VII, p.67, sommaire.
  2. Rational, lib. I, cap. I, § xx.
  3. Les Olim, ann. mccxcii, arr. 2.