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le peuple dans l’intérieur de chaque cité ; qu’ils le représentaient auprès des barbares ; qu’ils étaient ses magistrats en dedans, ses protecteurs au dehors[1]. »

Le palais épiscopal bâti, la cathédrale s’élève à côté, et chaque fois que la cathédrale se rebâtit à neuf, il est rare que le palais épiscopal ne soit point reconstruit en même temps. Or il nous reste quelques plans d’évêchés du XIIe siècle et même du XIe. Ces plans présentent une disposition à peu près uniforme : une grande salle, une chapelle, une tour ou donjon, des dépendances mixtes entre le palais et la cathédrale, et des logis qui, probablement, avaient peu d’importance, puisqu’on n’en trouve pas de traces. Le signe représentatif du pouvoir épiscopal, à la fois religieux et civil dans les premiers siècles du moyen âge, c’est la grande salle, curie canonique et civile, au besoin forteresse, qui devient plus tard l’officialité et la salle synodale. L’évêché de Paris, reconstruit par l’évêque Maurice de Sully, vers 1160, conservait encore ce caractère ; il ne faisait d’ailleurs que remplacer un palais plus ancien dont les fondations, découvertes par nous en 1845 et 1846, peuvent passer pour une structure gallo-romaine. C’était la résidence dont parle Grégoire de Tours, et qui existait de son temps. Dans la chapelle palatine épiscopale, dont nous avons vu encore les restes en 1830, on lisait cette inscription rapportée par le P. du Breuil[2] : « Hæc basilica (la chapelle) consecrata est a Domino Mauritio Parisiensi episcopo, in honore beatæ Mariæ, beatorum martyrum Dionysii, Vincentii, Mauritii, et omnium sanctorum. » Or ce palais, reconstruit par Maurice de Sully, se composait d’une grande salle, avec bâtiments tenant au chœur de la cathédrale, qu’il réédifiait en même temps, et d’une chapelle. Des logements privés du prélat, nulle trace. Voici (fig. 7) le plan du rez-de-chaussée de ce palais épiscopal du XIIe siècle.

En A était la chapelle, en B le donjon, en C la grande salle, qui alors, ne s’étendait pas au delà du mur pignon D. Le chœur de la cathédrale, rebâti par Maurice de Sully, est en E ; la salle F servait de trésor au premier étage, avec escalier de communication entre le palais et le chœur, et de sacristie au rez-de-chaussée. La grande salle au premier étage formait un seul vaisseau voûté. Ici la muraille gallo-romaine de la cité passe en M, sous la cathédrale et au delà de son abside, et en creusant les fondations de la nouvelle sacristie, nous avons retrouvé une substruction de la même époque en G et en P. Il semblerait donc que les évêques de Paris avaient profité d’un saillant formé par les défenses de la cité, d’une sorte de castellum, pour y enfermer le palais épiscopal. Le mur méridional de la grande salle était même bâti sur les fondements de l’enceinte gallo-romaine, et fut encore crénelé par Maurice de Sully.

  1. Guizot, Hist. de la civilis. en France, VIIIe leçon.
  2. Le Théâtre des antiquités de Paris, 1612, p. 43.