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qui ont bien quelque ressemblance avec les œuvres des Orientaux mentionnées ci-dessus, mais dont la structure cependant est mieux raisonnée. Ces clôtures, ces barrières, ces lambris étaient simplement formés de planches posées jointives, embrévées dans un bâti ; pour empêcher les planches de gauchir, de coffiner, autant que pour décorer les surfaces planes, au moins d’un côté, le menuisier rapportait par-dessus un treillis de bois légers assemblés à mi-bois et formant des combinaisons géométriques plus ou moins compliquées. La surface plane des planches était même souvent sculptée en faible relief (puisque la sculpture était obtenue aux dépens de l’épaisseur de ces planches) entre les compartiments formés par les treillis.

Voici (5) un exemple de ces ouvrages de menuiserie. Les joints des planches, d’une largeur d’un pied (0m,32), sont marqués sur notre dessin. Le treillis assemblé à ses extrémités dans les membrures du bâti, ainsi qu’il est indiqué en a (voir le détail A), est cloué, à chaque rencontre, sur les planches du fond, et forme ainsi une surface parfaitement rigide qui empêche le gauchissement de ce fond. Ce treillis est assemblé à mi-bois avec coupes d’onglet au droit des moulures, ainsi qu’on le voit en b. La coupé C donne en c l’épaisseur de la planche et en d celle du treillis[1]. Une claire-voie, composée de colonnettes tournées, surmontait l’appui D ; de distance en distance, des montants E maintenaient le tout. En F, nous donnons le profil de la traverse supérieure f ; en G, le profil de l’appui g et en H, le profil de la traverse basse h. Nous verrons tout à l’heure des vantaux d’une porte de l’église de Gannat, combinés d’après le même principe.

On comprendra comment les tringles de bois, rapportées sur ces planches et se coupant dans tous les sens, devaient les maintenir dans leur plan. Ce système, toutefois, est exceptionnel dans les œuvres de menuiserie du moyen âge en ce que nous n’y trouvons pas les panneaux embrévés, mais un fond simple sur lequel est cloué un réseau de bois ; ce réseau n’est pas seulement une décoration rapportée, il est composé de pièces assemblées et se tient de lui-même. Dès le XIIIe siècle, on avait façonné en France des ouvrages de menuiserie où le système des panneaux embrévés en feuillures est adopté ; mais les languettes et feuillures sont généralement alors à grain d’orge.

Nous donnons (6) un de ces panneaux, présenté de face en A, en coupe en B, et en section horizontale en B′. Ce système mérite quelque attention. Un lambris se compose de montants et de traverses, entre lesquels sont embrévés des panneaux. Les montants de rive, ceux qui forment les extrémités du lambris, reçoivent les traverses à tenons et mortaises ; tandis que les montants intermédiaires s’assemblent dans les traverses. En C, on voit un montant d’extrémité ; en D, un montant intermédiaire. Dans

  1. Cet ouvrage de menuiserie existait en fragments dans la cathédrale de Perpignan en 1834, et servait de lambris dans la chapelle Saint-Jean. Il était en sapin.