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[maison]
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À gauche se trouvait la grande salle de réception placée au premier étage ; on y arrivait de la cour par un escalier extérieur en bois. Trois fenêtres géminées ouvertes sur la façade qui regarde l’église éclairaient cette pièce ; elle était chauffée par une grande cheminée en pierre et recouverte par une charpente apparente lambrissée en berceau. À droite du passage se trouvaient la cuisine et deux pièces placées entre cour et jardin et qui servaient à l’habitation[1]. »

Dans quelques-unes de ces villes florissantes du Midi, aujourd’hui à peine connues, il existe encore des habitations des XIIIe et XIVe siècles qui participent à la fois de l’hôtel et de la maison. Le riche négociant de ces municipalités des bords de la Garonne, de l’Aveyron, du Tarn et du Lot, au sein desquelles les traditions gallo-romaines s’étaient assez bien conservées, prétendait, lorsqu’il construisait un hôtel, avoir des magasins sur la rue soit pour l’exercice de son propre négoce, soit pour louer. Ces constructions mixtes étaient fréquentes à Toulouse, à Alby, à Saint-Antonin, à Cordes, à Gaillac, à Villeneuve-d’Agen.

Nous donnons (32) le plan d’un de ces hôtels situé dans la grande rue de la ville de Cordes, en face la promenade de la Bride.

À droite et à gauche de l’entrée A, sont des magasins ou boutiques s’ouvrant sur la rue. En B est la cour principale et en C une petite cour de service à laquelle on arrive par un passage D. La salle ouverte E servait probablement d’écurie. F est un cellier. Un large escalier à vis G donne entrée dans la grande salle du rez-de-chaussée H, élevée de sept marches au-dessus du sol de la cour. Un passage I communique à un jardin K, situé en dehors du vieux rempart contre lequel est adossé l’hôtel. Des bâtiments d’une époque récente ont été construits en partie sur le jardin de a en b. Les boutiques LL n’avaient pas accès dans la cour et probablement ceux qui les occupaient logeaient ailleurs, à moins que ces magasins ne fussent à l’usage du propriétaire de l’hôtel. Le grand escalier G monte au premier étage dans une salle située au-dessus de celle H, et communique par un passage en bois M au logis de face dont la surface n’était divisée que par des cloisons. Un second étage s’élève encore sur ce logis de face et est desservi par le grand escalier et un second passage. L’écurie et le cellier ne possèdent qu’un rez-de-chaussée. Une petite terrasse N avec perron donne sur la cour en face de la salle H[2]. Cette habitation, qui date des premières années du XIVe siècle, a tous les caractères de l’hôtel du moyen âge, bien que des boutiques s’ouvrent sur la rue et que le bâtiment de face serve de logement au premier et au second étage.

Les renseignements que l’on peut réunir sur les hôtels des XIIIe et

  1. Voy. l’Archit. civ. et domest. par MM. Verdier et Callois, t. II, p. 205.
  2. Ces plans ont été relevés par M. Thomas, ex-architecte du Tarn. M. Thomas a fait sur les maisons de Cordes un travail intéressant déposé aux archives des Monuments historiques.