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[escalier]
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sent la bille en chêne de 0,50 c. de diamètre, ou environ en six triangles dans chacun desquels on trouve une marche, de façon à ce que le devant de chaque marche soit placé du côté du cœur du bois, le devant des marches étant la partie qui fatigue le plus. S’il reste quelques parties d’aubier ou des flaches, elles se trouvent ainsi dans la queue de la marche qui ne subit pas le frottement des pieds. Cette façon de prendre les marches en plein bois, le devant vers le cœur, a en outre l’avantage d’empêcher les bois de se gercer ou de se gauchir, les sciages étant précisément faits dans le sens des gerces. Ce débillardement des marches ne perd aucune des parties solides et résistantes du bois, les marches se trouvent toutes dans les mêmes conditions de dureté, et il reste en M de belles dosses que l’on peut utiliser ailleurs. On reconnaît que les constructeurs ont, soit pour les limons, soit pour les marches, choisi leurs bois avec grand soin afin d’éviter ces dislocations et ces gerces si funestes dans des ouvrages de ce genre. Quelquefois, mais rarement, les marches sont en noyer ou en châtaignier[1].

Ces premiers principes de construction posés, examinons d’abord un escalier à deux rampes et à paliers avec marches palières, limons droits et poteaux d’angle ; c’est l’escalier de charpente le plus simple, celui qui se construit par les moyens les plus naturels. Voici, fig. 27, en A, le plan d’une montée établie d’après ce système ; la première marche est en B, on arrive au premier palier C, on prend la seconde rampe dont la marche est en D, on monte jusqu’au palier E, qui est au niveau du premier étage, et ainsi de suite pour chaque étage. L’échelle du plan est de 0,01 c. pour mètre. Faisons une coupe longitudinale sur a b, et présentons la au double pour plus de clarté. Ses quatre poteaux d’angles montent de fond et se posent sur un parpaing de pierre. Le premier limon repose également sur cette assise et vient s’assembler dans le poteau F qui reçoit à mi-bois la marche palière G, soulagée encore par une poutrelle assemblée à tenons et mortaises, et reposant sur le renfort H. Passons à la troisième rampe qui est semblable en tout à la seconde, et qui est figurée dans la coupe. Le limon est soulagé dans sa partie par un gousset I et un lien K. Les grands liens sont surtout nécessaires pour empêcher le roulement et les poussées qui ne manquent pas de se produire dans un escalier de ce genre s’il dessert plusieurs étages ; ils roidissent tout le système de charpente, surtout si, comme nous l’avons tracé, on établit un panneau à jour dans le triangle formé par le poteau, le limon et ce lien. Les montants des balustrades sont assemblés dans les limons, et leurs mains-courantes dans les poteaux.

Examinons maintenant comment se combinent les assemblages des limons dans les poteaux, les marches palières, les poutrelles de buttée des paliers, etc. Fig. 28 : en A, nous avons tracé sur une même projection verticale les poteaux en regard, la marche palière, la marche d’arrivée et

  1. Particulièrement dans le centre de la France.