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Louis XIV on ait encore exécuté d’assez beaux ouvrages en ce genre ; mais alors ils ne s’appliquent plus qu’aux grands monuments, aux habitations princières : c’est un luxe que ne se permet pas le simple particulier[1] (voy. Crête, Girouette).

ESCALIER, s. m. Degré. Nous distinguerons les escaliers extérieurs (qu’il ne faut pas confondre avec les perrons) des escaliers intérieurs, les escaliers à rampes droites des escaliers à girons et à vis, les escaliers de pierre des escaliers de bois. Dans les édifices romains, les théâtres et amphithéâtres exceptés, les escaliers sont assez étroits et peu nombreux. D’ailleurs les Romains employaient les escaliers à rampes droites et à vis ; mais ils ne paraissent pas (du moins dans les intérieurs) avoir jamais considéré l’escalier comme un motif de décoration monumentale, ainsi qu’on l’a fait dans les temps modernes. Les escaliers des édifices antiques sont un besoin satisfait de la manière la plus simple, un moyen pour communiquer d’un étage à l’autre, rien de plus. Nous ne déciderons pas si, en cela, les anciens avaient tort ou raison ; nous constatons seulement le fait, afin qu’on ne puisse accuser les architectes des premiers temps du moyen âge d’être restés en cela fort au-dessous de leurs maîtres.

D’ailleurs les architectes du moyen âge, comme les architectes romains, n’eussent jamais établi, dans un bâtiment, un escalier dont les rampes auraient bouché une ordonnance de baies, ainsi que cela se fait volontiers de notre temps, même dans de grands édifices. Les Romains gardaient les dispositions monumentales des escaliers pour les degrés extérieurs à ciel ouvert. À l’intérieur, ils plaçaient toujours les rampes perpendiculairement aux murs de face, afin que les hauteurs des paliers pussent concorder avec les hauteurs des planchers et par conséquent avec l’ordonnance des baies ; mais nous reviendrons sur cette question importante.

Pour peu qu’on se soit occupé de distributions intérieures, on sait combien il est difficile de disposer convenablement les escaliers, soit pour satisfaire aux programmes, soit pour ne pas gêner des dispositions architectoniques extérieures ou intérieures. Les anciens ne soulevaient pas la difficulté ; c’était un moyen de ne pas avoir besoin de la résoudre.

L’escalier romain le plus ordinaire est ainsi disposé (1). Il se compose de deux rampes séparées par un mur de refend, la première arrivant à un palier d’entresol A, la seconde au palier de premier étage B, et ainsi de suite. Les marches sont alors portées sur les voûtes rampantes, si les degrés sont très-larges, ou simplement engagées par les deux bouts dans les murs, si ces degrés sont étroits. C’est ainsi que sont conçus et exécutés les escaliers des thermes, des théâtres et amphithéâtres romains. On ne chercha pas d’autre système d’escalier dans les premiers monuments du

  1. Il faut dire que depuis peu cet art ou cette industrie, si l’on veut, a repris une certaine importance. C’est encore une des sources de richesse que nous devons à l’étude des arts du moyen âge.