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[échauguette]
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Ici encore, c’est un large contre-fort rectangulaire naissant sur le talus inférieur et portant l’encorbellement du premier redan ; puis un second contre-fort en encorbellement lui-même portant la saillie du second redan. Des larmiers abritent les profils et empêchent la pluie de baver sur les parements.

Dans l’architecture militaire, les échauguettes n’ont été abandonnées qu’après Vauban. On les regardait comme utiles, même avec l’artillerie à feu, pendant les XVIe et XVIIe siècles ; les angles saillants des bastions portaient encore des échauguettes, il y a deux cents ans, destinées uniquement à abriter les sentinelles. Il va sans dire qu’en cas de siège c’était la première chose qu’abattait l’assaillant. Cette persistance de l’échauguette constate seulement son importance dans les ouvrages militaires du moyen âge, puisqu’on eut tant de peine à l’abandonner, même après que tout le système de la défense s’était transformé. Les dernières échauguettes sont en forme de poivrière, très-étroites, portées sur un cul-de-lampe et n’ayant que la valeur d’une guérite, c’est-à-dire bonnes seulement pour surveiller les dehors, mais ne pouvant servir à la défense. Cependant, au commencement du XVIe siècle, et au moment où l’on établit déjà des boulevards revêtus, en dehors des anciennes enceintes, lorsque ces boulevards présentent un angle saillant (ce qui est rare, la forme circulaire étant alors admise), cet angle saillant est garni quelquefois d’une assez large échauguette quadrangulaire, posée la face sur l’angle du boulevard, ainsi que l’indique la fig. 18. Ces échauguettes pouvaient recevoir un fauconneau ; elles étaient ordinairement revêtues de combles en dalles posées sur une voûte, décorées d’armoiries et d’autres ornements qui donnaient aux saillants des boulevards un certain air monumental. Le temps et les boulets ont laissé peu de traces de ces petits ouvrages que nous ne retrouvons plus que dans d’anciennes gravures ; et c’est à peine si, aujourd’hui, sur nos vieux bastions français, on aperçoit quelques assises des encorbellements qui portaient ces sortes d’échauguettes.

Sur les boulevards en terre et clayonnages dont on fit un grand usage pendant les guerres du XVIe siècle pour couvrir d’anciennes fortifications, on établissait des échauguettes en bois en dehors de l’angle saillant des bastions et au milieu des courtines (18 bis), afin de permettre aux sentinelles de voir ce qui se passait au fond des fossés. Ces sortes d’échauguettes sont employées jusqu’au XVIIe siècle.

On établissait aussi des échauguettes transitoires en bois sur les chemins de ronde des fortifications du moyen âge ; ces échauguettes se reliaient aux hourds et formaient des sortes de bretèches (voy. ce mot). Quant aux échauguettes à demeure en charpente, nous les avons scrupuleusement détruites en France. À peine si nous en apercevons les traces sur quelques tours ou clochers. Pour trouver de ces sortes d’ouvrages encore entiers, il faut se décider à passer le Rhin et parcourir l’Allemagne conservatrice.

Sur le bord oriental du lac de Constance est une charmante petite ville qui a nom Lindau ; c’est une tête du chemin de fer bavarois. Lindau a