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[cul-de-lampe]
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retrouver des points d’appui pour les sommiers des arcs doubleaux. Ils pensèrent donc à poser, au-dessus de la rencontre des archivoltes des collatéraux, des pierres saillantes sur lesquelles ils élevèrent alors les colonnes engagées C. Ils donnèrent généralement à ces pierres saillantes la forme d’un cul-de-lampe et non d’un corbeau, parce qu’en effet cette forme diminuée par le bas s’arrangeait mieux avec la rencontre des deux extrados des archivoltes. Il n’est pas nécessaire de dire que ces culs-de-lampe primitifs sont barbares : ce ne sont parfois que des cônes renversés légèrement cannelés (3), ou des têtes humaines ou d’animaux grossièrement sculptées.


Ces culs-de-lampe cependant, par leur position même, attiraient les regards ; placés quelquefois assez près de l’œil, on chercha, lorsque la sculpture romane devint moins sauvage, à en faire des œuvres remarquables ; on en confia l’exécution aux mains les plus habiles. Déjà, dans les provinces qui possèdent de bonnes écoles de sculpteurs vers la fin du XIe siècle et au commencement du XIIe, on signale des culs-de-lampe aussi remarquables par le style que par la pureté de leur exécution. Un des plus beaux culs-de-lampe que nous connaissions de cette époque se trouve à l’entrée du chœur de l’église haute de Chauvigny (Poitou) : il porte une colonne d’arc doubleau, et a été posé afin de dégager la partie inférieure de la pile et laisser plus de largeur au vaisseau pour placer des bancs ou des stalles.

Nous donnons ce cul-de-lampe (4), en A de face et en B de profil. Cette sculpture, par son style, rappelle la meilleure sculpture grecque byzantine. Où les artistes occidentaux du commencement du XIIe siècle avaient-ils été prendre ces types, ces arrangements de coiffure si gracieusement reliés à l’architecture ? C’est ce que nous examinons dans l’article Sculpture.

Il existait, dans les réfectoires d’abbayes des XIIe et XIIIe siècles, des chaires de lecteurs qui étaient portées sur de magnifiques culs-de-lampe, au dire des auteurs qui les ont vus, car il ne reste plus que des traces mutilées de ces sculptures. Le cul-de-lampe de la chaire de lecteur de