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commencement du XIIIe siècle ; c’est-à-dire jusqu’à l’application franche du style gothique, la Champagne et la Bourgogne abandonnent encore plus difficilement cette tradition romane. Ainsi, au sommet du chœur de la cathédrale de Langres, XIIe siècle, nous voyons une corniche dans laquelle les corbeaux prennent une importance majeure (10).


La tablette est alternativement supportée par des corbeaux moulurés et représentant des têtes d’hommes ou d’animaux. Au sommet du porche de l’église de Vézelay, dès 1130 environ, on remarque déjà ces alternances de corbeaux profilés et de têtes. À la fin du XIIe siècle, autour du chœur de l’église de Notre-Dame de Châlons-sur-Marne, la corniche présente encore des corbeaux à têtes, d’autres ornés de rosaces, d’autres simplement profilés. Mais ici la tablette prend déjà plus d’importance, et elle se couvre d’une riche décoration de feuillages (11).

Dans l’Angoumois, le Poitou et la Saintonge, la corniche à corbeaux, dans le style de celle d’Auvergne, est reproduite jusque vers la fin du XIIe siècle (voy., à l’article Chapelle, la fig. 33, qui représente une portion de l’abside de l’église de Saint-Euthrope de Saintes).

En Normandie, la corniche romane est d’une grande simplicité et ne présente qu’une faible saillie sur le nu des murs. Souvent elle ne se compose que d’une simple tablette de 0,10 c. à 0,15 c. d’épaisseur. Cependant les corbeaux, avec ou sans arcature, se rencontrent fréquemment. Ces corbeaux même reposent parfois sur un filet orné, comme autour de l’abside de l’abbaye aux Dames de Caen (12) (XIIe siècle).

De tous les exemples qui précèdent, on peut conclure ceci : c’est que, pendant la période romane, et dans les provinces diverses qui composent aujourd’hui la France, la corniche se compose, à très-peu d’exceptions près, d’un rang de corbeaux supportant une tablette saillante. Nous allons voir comment les architectes laïques de la fin du XIIe siècle adoptent un système de corniches tout nouveau, en empruntant cependant à la corniche romane quelque chose de sa physionomie, savoir : les alter-