Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 4.djvu/306

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[contre-fort]
— 303 —

veut se rendre compte, par exemple, du tracé des gros contre-forts qui épaulent la façade occidentale de la cathédrale de Rouen, et qui furent élevés au commencement du XVIe siècle sous le cardinal d’Amboise, peut passer un mois entier à relever leurs plans, à comprendre les pénétrations des centaines de prismes qui les composent ; et cependant ce travail et cette recherche ne produisent, en exécution, qu’un effet désagréable.

Les contre-forts du XVe siècle et du commencement du XVIe se composent généralement d’un corps dont les faces se coupent et se pénètrent suivant des angles à 45 degrés. Ainsi la base est carrée, présentant une face parallèle au mur et deux faces perpendiculaires à ce mur. Au-dessus de la première retraite, le carré, au lieu de présenter un de ses côtés sur la face, présente un angle ; les deux côtés diagonaux alors sont flanqués jusqu’à une certaine hauteur de deux appendices à base carrée, les faces parallèles aux faces de la génératrice, et formant des prismes terminés par des pyramides ; au-dessus, le contre-fort se présente d’angle et porte des pignons, puis son pinacle.


Le plan (20) donne la section horizontale de ces sortes de contre-forts, et l’élévation (21) leur aspect. Ce principe, pendant les derniers temps de l’architecture gothique, est appliqué avec une monotonie désespérante. Quelquefois, ces carrés, posés leurs faces parallèles aux parements ou diagonalement, se subdivisent encore, se creusent en niches, se couvrent d’un plus ou moins grand nombre de profils ; mais le principe est toujours le même (voy. Pinacle, Trait ). C’est encore dans l’Île-de-France que les abus de ces pénétrations sont le moins fréquents et que l’on rencontre, jusqu’aux derniers efforts du gothique, un goût fin ; que l’on sent, chez les architectes, une sorte de répulsion pour les exagérations.

Le joli hôtel de la Trémoille à Paris, dont la démolition est à jamais regrettable, et qui avait été bâti dans les premières années du XVIe siècle, conservait, au milieu du luxe d’architecture de cette époque, cette sobriété dans les détails et cette raison dans la composition sans lesquelles toute