Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 3.djvu/365

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[clocher]
— 362 —

Il n’est pas besoin de faire ressortir la beauté et la grandeur de cette composition dans laquelle l’architecte a fait preuve d’une rare sobriété, où tous les effets sont obtenus non par des ornements, mais par la juste et savante proportion des diverses parties. La transition si difficile à établir entre la base carrée et l’octogone de la flèche est ménagée et conduite avec une adresse qui n’a point été surpassée dans les monuments analogues. On pourrait peut-être reprocher aux contreforts d’angle de la tour carrée de finir trop brusquement sous le bandeau K ; mais, en exécution, ce défaut, apparent sur le dessin géométral, est complétement détruit à cause de la faible saillie de ces contreforts qui ne compte plus à cette hauteur, et par le jeu des ombres des lucarnes et pinacles qui s’harmonise de la façon la plus heureuse avec les saillies et les parties ajourées de la souche carrée. Les trompes qui portent la flèche ne prennent naissance qu’au-dessus des baies des quatre pinacles, et le plan (60), pris au niveau L, fait voir avec quelle adresse les constructeurs ont su faire pénétrer l’octogone dans le carré.


Les quatre pinacles d’angle, au lieu de n’être qu’un ornement comme dans les clochers romans, comme dans le clocher de la Trinité de Vendôme, sont de véritables contreforts, bien chargés, qui reportent le poids des quatre côtés de l’octogone, parallèles aux diagonales du carré, sur les quatre angles de la tour. Les quatre pignons couronnant les lucarnes ont aussi leur utilité et sont plus qu’une simple décoration ; ils chargent les quatre faces du tambour parallèles aux côtés du carré, afin de donner à ces faces de la souche octogonale une résistance puissante. Le dernier étage (fig. 60) est aussi léger que possible ; les pieds-droits sont minces, et le roulement de cet étage est parfaitement maintenu par les pinacles formant éperons ; cependant, le dans-œuvre de la souche de la flèche n’a pas moins de 10m,20 d’un parement à l’autre. L’exécution des détails du clocher vieux de Chartres répond à cet ensemble grandiose ; la construction est traitée avec un soin particulier, les assises sont parfaitement réglées, l’appareil très-savant ; les profils et la sculpture sont de la plus grande beauté ; sur aucun point on ne trouve l’architecte en faute, on ne