Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 3.djvu/288

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[cloche]
— 285 —

semblable au bronze des statues grecques ; le cuivre y entrait certainement pour une forte part.

Mais c’est à dater du XVe siècle surtout que l’on donna aux cloches des dimensions et un poids considérables. Le premier bourdon de la cathédrale de Paris fut fondu, en 1400, par Jean de Montaigu, frère de Gérard de Montaigu, quatre-vingt-quinzième évêque de Paris ; on le nomma Jacqueline, du nom de l’épouse de Jean. Il pesait, dit-on, 15 000 livres[1]. Un second bourdon fut donné à l’église de Paris en 1472 ; il pesait 25 000 livres. La célèbre cloche de Rouen, donnée par le cardinal d’Amboise, et fondue en 1501, pesait 36 364 livres. Elle fut fêlée en 1786 et ne fut pas refondue.

Un des plus anciens bourdons qui ait été conservé est celui de la cathédrale de Reims ; il fut fondu en 1570 et pèse 23 000 livres. Il existe encore des cloches de moyenne grandeur, des XVe et XVIe siècles, dans les cathédrales d’Amiens, de Beauvais, de Sens, de Metz, de Chartres, dans l’ancienne cathédrale de Carcassonne, dans les églises de Saumanes (Vaucluse), de Notre-Dame de Bon-Secours à Orléans, de Trumilly (Oise), etc., dans les beffrois des villes de Valenciennes, de Béthune, de Compiègne.

À dater du XVIe siècle, les cloches sont décorées de filets d’ornements, de rinceaux, de fleurs de lis, d’armoiries, de petits bas-reliefs représentant le crucifiement de Notre-Seigneur, avec la sainte Vierge et saint Jean, Jésus descendu de la croix entre les bras de sa mère, de sceaux des chapitres, abbayes, églises et donateurs ; il faut dire que plus on se rapproche du XVIIe siècle et moins la fonte des cloches est pure.

Les inscriptions façonnées dans les moules pour chaque cloche, pendant les XIIIe et XIVe siècles, ainsi que le démontre la fig. 2, sont faites, à partir de la fin du XVe siècle, au moyen de caractères de plomb ou de bois servant à imprimer chaque lettre sur une petite plaque de cire que l’on appliquait sur le modèle avant de faire le creux ; par suite de ce procédé, les lettres se trouvent inscrites chacune dans une petite tablette plus ou moins décorée, ainsi que l’indique la fig. 3, copiée sur

  1. Presque toujours les poids des bourdons ont été exagérés, et les inscriptions qui les mentionnent sur leurs parois sont souvent fautives. Ainsi, le bourdon actuel de Notre-Dame, qui passe pour peser plus de 32 000 livres, ne pèse en réalité que 13 000 kilogrammes.