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[chœur]
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d’autres châsses étaient disposées à droite et à gauche ; derrière la châsse de saint Marcel était, du côté droit, le petit autel de la Trinité, dit des Ardents, sur lequel était placée la châsse de Notre-Dame, contenant du lait de la sainte Vierge et des fragments de ses vêtements. Près de l’entrée principale du chœur, on voyait, en ronde-bosse, la statue de bronze de l’évêque Odon de Sully, couchée sur une table de même métal élevé d’un pied environ au-dessus du niveau du pavé du chœur. Odon de Sully contribua en partie à la construction de la cathédrale ; c’est sous son épiscopat que fut probablement élevée la nef. Au milieu du chœur, sous le lutrin, étaient incrustées, au niveau du pavé, quatre pierres tombales, couvrant les restes de la reine Isabelle de Hainaut, femme de Philippe-Auguste, de Geoffroy, duc de Bretagne, et de deux autres personnages inconnus. Devant le grand autel, sous une table de cuivre, le cœur de Louise de Savoie, mère de François Ier. D’autres tombes se voyaient encore derrière le grand autel du temps de Corrozet, entre autres celles du célèbre Pierre Lombard, archidiacre de la cathédrale et prince ; car on n’enterrait dans le chœur des cathédrales que des évêques, des princes et princesses. À côté du maître autel, du côté du nord, s’élevait, sur une colonne de pierre, la statue de Philippe-Auguste ; à ses pieds était la tombe en marbre noir de l’évêque Pierre de Ordemont, qui mourut en 1409.

Mais quelle que fût la richesse et la splendeur des chœurs des cathédrales, ceux-ci n’égalaient pas, en étendue, en meubles richement ouvragés, en châsses précieuses et en tombeaux magnifiques, les chœurs et sanctuaires des grandes abbayes. Parmi ces abbayes, celle de Saint-Denis, en France, se distinguait entre toutes, puisque le chœur de son église servait de sépulture aux princes français. Le plan de ce chœur et de ce sanctuaire est donné dans l’histoire de l’abbaye de Saint-Denis, par dom Félibien ; nous nous contenterons d’en tracer la vue cavalière, qui fera mieux comprendre les dispositions principales de cette clôture vénérée (2). Ici, comme dans toutes les églises abbatiales, le chœur, proprement dit, occupait les dernières travées de la nef, la croisée et une travée de l’abside ; le sanctuaire, auquel on montait par quatre rampes de dix-huit degrés chacune, deux petites de chaque côté de l’autel et deux grandes dans les deux collatéraux, s’étendait dans l’abside au-dessus de l’ancienne crypte carlovingienne.

Dom Doublet[1] nous fournira la description détaillée de toutes les parties du chœur et sanctuaire de la célèbre église abbatiale. L’entrée du chœur était fermée par un jubé, sur le devant duquel, du temps de dom Doublet, on voyait encore, sculptés en pierre, la vie et le martyre de saint Denis, de saint Rustic et de saint Éleuthère. Sur l’arcade principale s’élevait le crucifix donné par l’abbé Suger ; les images de la Vierge et de saint Jean accompagnaient la croix. C’était du haut du jubé que, les jours de fêtes,

  1. Histoire de l’abbaye de Saint-Denys en France, par D. Doublet. 1625.