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colonnettes avec deux biseaux, mais des moulures plus compliquées ; cela était motivé par des raisons que nous n’avons pas à examiner ici (voy. Meneau). La multiplicité de ces nerfs verticaux, les ombres qu’ils projetaient absorbaient le chapiteau dont la décoration simple ne pouvait lutter avec ces effets de lumière et d’ombre ; il fallut orner davantage la corbeille du chapiteau ; on ajouta au-dessous des crochets un rang de feuilles qui épousaient la forme de la corbeille à leur naissance et s’en détachaient à leur extrémité supérieure ; puis bientôt ces feuilles elles-mêmes ne parurent pas prendre assez d’importance, et on les remplaça par une première rangée de crochets épanouis (1245 à 1250) (46 bis, A et B).


Le chapiteau du meneau, par le relief de son ornementation, put ainsi arrêter le regard préoccupé de la multiplicité des ombres verticales. C’est ainsi que peu à peu la sculpture devenait plus détaillée, plus compliquée, à mesure que les membres de l’architecture se subdivisaient ; les maîtres, en restant esclaves d’un principe, perdaient de vue l’effet général. Une moulure de plus ajoutée à un arc, à des meneaux, les obligeait à changer l’échelle de tous les détails de la sculpture. Dans certaines provinces même, de 1235 à 1245, en Champagne et en Normandie, on ne considéra le chapiteau des meneaux que comme un simple ornement destiné à marquer le point de départ des courbes ; on supprima quelquefois le tailloir qui présentait une saillie, un encorbellement, l’assiette d’un corps plus large que le fût de la colonnette ; les crochets ou feuillages vinrent seuls arrêter l’extrémité des colonnettes des meneaux.