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à Westminster, à Lincoln, à Salisbury, à Ely, en Angleterre ; et cependant, comme disposition de plan, la cathédrale de Bayeux se rapproche plus des cathédrales françaises du XIIIe siècle, au moins dans sa partie orientale, que des cathédrales anglaises. C’est qu’au XIIIe siècle, si la Normandie possédait son style d’architecture propre, elle subissait alors l’influence des édifices du domaine royal.

La cathédrale de Dol seule, en Bretagne, paraît s’être affranchie complétement de l’empire qu’exerçaient, sur tout le territoire occidental du continent, les dispositions de plan adoptées, à la fin du règne de Philippe-Auguste, dans la construction des cathédrales, La cathédrale de Dol est terminée, à l’orient, par un mur carré, dans lequel s’ouvre un immense fenestrage, comme les cathédrales d’Ely et de Lincoln.

La cathédrale de Coutances, fondée en 1030 et terminée en 1083, soit qu’elle menaçât ruine comme la plupart des grandes églises du Nord de cette époque, soit qu’elle parût insuffisante, soit enfin que le diocèse de Coutances, nouvellement réuni à la couronne de France, voulût entrer dans le grand mouvement qui alors faisait reconstruire toutes les cathédrales au nord de la Loire ; la cathédrale de Coutances, disons-nous, fut complétement réédifiée dès les premières années du XIIIe siècle. Le chœur, avec ses chapelles rayonnantes, qui rappellent celles du chœur de la cathédrale de Chartres, paraît avoir été fondé vers la fin du règne de Philippe-Auguste. Les constructions de la nef durent suivre presque immédiatement celles du sanctuaire ; mais il est probable que les transsepts furent élevés sur les anciennes fondations romanes du XIe siècle, et que même les énormes piliers de la croisée ne font, comme à Bayeux, qu’envelopper un noyau de construction romane.

En effet, si nous examinons le plan (38) de cette partie de l’édifice, nous y trouvons une sorte de gêne dans l’ensemble des dispositions, et la trace encore bien marquée des chapelles normandes des croisillons. Quelle que fût la charge que le maître de l’œuvre voulait faire porter aux quatre piliers de la croisée (charge énorme, il est vrai), il nous paraît difficile d’admettre, qu’en plein XIIIe siècle, s’il n’eût pas été commandé par des substructions antérieures, il ne se fût pas tiré avec plus d’adresse de cette partie importante de son projet. Quoi qu’il en soit, il ne reste plus de traces visibles de constructions romanes dans la cathédrale de Coutances ; c’est un édifice entièrement de style ogival pur ; la chapelle de la Vierge, à l’extrémité de l’abside, et les chapelles de la nef furent seules ajoutées après coup, au XIVe siècle[1]. La façade occidentale est surmontée de deux clochers avec flèches en pierre, sous lesquels, outre les trois portes princi-

  1. Les chapelles de la nef présentent une disposition si belle et si rare, que nous avons cru devoir les donner sur ce plan, bien qu’elles dénaturent les dispositions primitives. Ces chapelles sont mises en communication les unes avec les autres à une hauteur de trois mètres environ, par des claires-voies ou meneaux sans vitraux ; c’est comme un collatéral qui serait divisé par des cloisons transversales peu élevées.