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cependant est considérable. Ce béton, coulé et pilonné dans un encaissement, est composé d’une chaux hydraulique mêlée avec le sable limoneux de l’Aude et de petits fragments de brique ; le caillou est cassé très-menu et presque entièrement composé de grès vert. Ici, l’intention bien évidente des constructeurs a été de réserver ces pierres factices pour les grandes portées ; ils les estimaient donc plus résistantes que le grès du pays, qui cependant est très-dur ; et ils ne se sont pas trompés, car ces linteaux n’ont subi aucune altération[1]. Lorsqu’au XIIIe siècle les constructions ne se composèrent plus que de murs minces et de points d’appui grêles, le béton ne trouvait plus d’emploi qu’en fondation, et encore on ne saurait donner ce nom aux maçonneries bloquées alors en usage (voy. Blocage).

BIBLIOTHÈQUE, s. f. Jusqu’au moment où l’imprimerie fut inventée, les bibliothèques, composées de manuscrits, ne pouvaient être très-nombreuses, les salles pour les contenir très-vastes. Les monastères possédaient tous des bibliothèques que les frères copistes augmentaient lentement. Ces bibliothèques n’occupaient guère qu’une salle dit couvent, de médiocre étendue, autour de laquelle des armoires en bois étaient destinées à contenir les manuscrits. Les rois, les grands personnages, dès le XIVe siècle, voulurent avoir des bibliothèques dans leurs palais. Charles V réunit au Louvre une bibliothèque fort nombreuse pour l’époque. Charles d’Orléans avait formé une bibliothèque dans son château de Blois. En 1427, ce prince, prisonnier en Angleterre, ayant su que les Anglais mettaient le siège devant Montargis, donna pouvoir au sire de Mortemart d’enlever de Blois ses meubles et sa bibliothèque, et de tout transporter à Saumur[2].

Toutefois, les salles dans lesquelles les manuscrits étaient déposés ne paraissent pas avoir présenté, avant l’invention de l’imprimerie, des dispositions particulières.

BIEF, s. m. Canal qui va prendre l’eau d’un ruisseau ou d’une rivière en aval, pour la conduire à niveau au-dessus de la roue d’un moulin, en profitant de la différence de niveau qui existe entre le point de la prise et celui où l’usine est établie. Le bief est ordinairement formé par des digues en terre ; mais autrefois ce n’était souvent qu’un canal formé de planches posées sur des chevalets.

Les grands établissements monastiques du XIIe siècle possédaient des

  1. La colonnette qui divise en deux cette fenêtre est en marbre blanc des Pyrénées, ainsi que la base et le chapiteau ; les piédroits et le second linteau B sont en grès vert. Les constructeurs ont donc admis qu’un morceau de béton était moins fragile que les pierres naturelles, étant seulement soutenu à ses extrémités et chargé sur le milieu. Ce linteau n’a que 0m, 25 d’épaisseur sur une longueur de 1m, 20 de portée et une largeur de 0m, 30 environ.
  2. École des chartes, t. V, p. 59. Voir l’inventaire de cette bibliothèque.