Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 2.djvu/189

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[bef]
— 186 —

et d’une dimension peu ordinaire ; mais il faut dire que cet arc doubleau n’est pas à l’échelle de l’architecture du chœur, et que le maître de l’œuvre a voulu dissimuler la lourdeur de cet arc par une dentelure qui lui donne de la légèreté ; c’est là une exception[1]. L’abus de la moulure en bâtons-rompus, dans les édifices de la dernière période romane en Normandie et en Angleterre, fatigue et donne un aspect monotone à l’architecture de cette époque. Cette moulure en zigzags porte mal sur les tailloirs des chapiteaux lorsqu’elle prend une certaine importance ; elle ne produit un bon effet que lorsqu’elle est comprise entre des nerfs accusant la courbe de l’arc, comme dans le chœur de la cathédrale de Canterbury (3)[2], lorsque ses dentelures ne sont pas assez saillantes pour rompre cette courbe.

On voit encore des bâtons-rompus dans l’architecture de la première période ogivale, comme à la cathédrale de Noyon, dans le chœur de l’église Saint-Germer. Ils disparaissent complètement lorsque le système de l’architecture adopté à la fin du XIIe siècle se développe, c’est-à-dire vers 1200.

BEFFROI, s. m. Baffraiz. On désigne par ce mot un ouvrage de charpente destiné à contenir et à permettre de faire mouvoir des cloches ; prenant le contenant pour le contenu, on a donné le nom de beffroi aux tours renfermant les cloches de la commune. Les tours roulantes en bois destinées à l’attaque des places fortes pendant le moyen âge, et jusqu’à l’emploi de l’artillerie à feu, sont aussi nommées beffrois ou bretèche (voy. ce mot).

Beffrois de charpente.

Les clochers des églises sont toujours disposés pour contenir des beffrois en charpente, au milieu desquels manœuvrent les cloches. Ces beffrois sont posés sur une retraite ou sur des corbeaux ménagés dans la construction des tours, et s’élèvent en se rétrécissant

  1. Cet arc doubleau a été déposé et reposé avec surélévation au XIIIe siècle, lorsque la nef de cette église fut reconstruite, ainsi que les voûtes hautes du chœur.
  2. En parlant de l’architecture française, on ne s’étonnera pas si nous citons souvent la cathédrale de Canterbury. Le chœur de cette cathédrale a été élevé par des architectes sortis de France (voy. The Architect. Histor. of Canterbury cathedral, par le Rév. R. Willis. London, 1845.)