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dans l’histoire de la civilisation, les arts qui sont destinés à faire faire un grand pas à l’esprit humain sont précisément ceux qui jettent tout à coup une vive clarté pour s’éteindre bientôt par l’abus même du principe qui les a amenés promptement à leur plus grand développement (voy. Architecture).

Les besoins auxquels les architectes du moyen âge avaient à satisfaire en élevant leurs églises les amenaient presque malgré eux à employer l’arc-boutant ; nous allons voir comment ils ont su développer ce système de construction et comment ils en ont abusé.

Ce n’est, comme nous venons de le dire, qu’à la fin du XIIe siècle que l’arc-boutant se montre franchement dans les édifices religieux du nord de la France ; il n’apparaît dans le centre et le midi que comme une importation, vers la fin du XIIIe siècle, lorsque l’architecture ogivale, déjà développée dans l’Île-de-France, la Champagne et la Bourgogne, se répand dans tout l’occident.

Nous donnons en première ligne et parmi les plus anciens l’un des arcs-boutants du chœur de l’église Saint-Remy de Reims, dont la construction remonte à la dernière moitié du XIIe siècle (50). Ici l’arc-boutant est simple, il vient contre-butter les voûtes au point de leur poussée, et répartit sa force de résistance sur une ligne verticale assez longue au moyen de ce contre-fort porté sur une colonne extérieure, laissant un passage entre elle et le mur au-dessus du triforium. Mais bientôt les constructeurs observèrent que la poussée des voûtes en arcs d’ogives d’une très-grande portée, agissait encore au-dessous et au-dessus du point mathématique de cette poussée. La théorie peut, en effet, démontrer que la poussée d’une voûte se résout en un seul point, mais la pratique fait bientôt reconnaître que cette poussée est diffuse et qu’elle agit par suite du glissement possible des claveaux des arcs et de la multiplicité des joints, depuis la naissance de ces arcs jusqu’à la moitié environ de la hauteur de la voûte (51). En effet, soit A