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nait au-dessus les écailles en moindre nombre sans que l’œil fût choqué du changement apporté dans le recouvrement régulier des joints (2) ; ou bien encore, lorsque par suite d’un recouvrement régulier de quelques rangs sur une surface conique, les ardoises devenaient trop étroites pour qu’il fût possible de continuer, on reprenait le rang suivant par des ardoises couvrant deux joints (3).

Suivant la nature du schiste, les ardoises étaient plus ou moins grandes ou épaisses.

Dans la montagne Noire, dans une partie de l’Auvergne, les schistes se délitent mal et sont remplis de filons durs qui empêchent de les tailler régulièrement : aussi dans ces contrées les couvertures sont grossières ; mais dans les Ardennes, sur les bords de la Moselle, et dans l’Anjou, les schistes très-purs permettent une grande régularité dans la taille de l’ardoise, et dès le XIIIe siècle on n’a pas manqué de profiter des qualités de ces matériaux pour faire des couvertures à la fois solides, faciles à poser, peu dispendieuses et d’une apparence fort agréable. La couleur de l’ardoise de l’Anjou, son aspect métallique et son peu d’épaisseur, se mariant parfaitement avec le plomb, on continuait à employer ce métal pour garnir les poinçons, les faîtages, les arêtiers, les noues, les lucarnes, réservant l’ardoise pour les grandes parties plates. Mais les architectes du XIIIe siècle avaient une sorte de répulsion pour la banalité, qui leur fit bientôt chercher les moyens d’employer l’ardoise en la faisant servir à la décoration en même temps qu’à la couverture des édifices. Ils avaient remarqué que l’ardoise obtient un reflet différent suivant qu’on présente sa surface dans un sens ou dans l’autre à la lumière du soleil ; ils utilisèrent sans dépense aucune