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en état de résister à l’artillerie ; mais cette arme se perfectionnait rapidement. Louis XI et Charles VIII possédaient une artillerie formidable, l’art des siéges devenait tous les jours plus méthodique, à cette époque déjà on faisait des approches régulières ; on commençait, lorsque l’attaque des places ne pouvait être brusquée, à faire des tranchées, à établir des parallèles et de véritables batteries de siége bien gabionnées. Les murs dépassant le niveau des crêtes des revêtements des fossés offraient une prise facile au tir de plein fouet des batteries de siége, et à une assez grande distance on pouvait détruire ces ouvrages découverts et faire brèche. Pour parer à cet inconvénient on garnit les dehors des fossés de palissades ou parapets en maçonnerie ou en charpente avec terrassements et premier fossé extérieur ; cet ouvrage, qui remplaçait les anciennes lices, conserva le nom de braie (56).

On établit en dehors des portes, des poternes et des saillants, des ouvrages en terre soutenus par des pièces de bois qu’on nommait encore boulevert, bastille ou bastide. La description de la fortification de Nuys, que Charles le Téméraire assiégea en 1474, explique parfaitement la méthode employée pour résister aux attaques[1]. « Pareillement estoit Nuysse notablement tourrée de pierre de grès, puissamment murée de riche fremeté, haulte, espaisse et renforcée de fortes braiesses, subtelement composées de pierre et de brique, et en aulcuns lieux, toutes de terre, tournées à deffence par mirable artifice pour reppeller les assaillants ; entre lesquelles et lesdits murs y avoit certains fossés assés parfons ; et, de rechef, estoient devant lesdites brayes aultres grants fossés d’extrème profondeur, cimés les aulcuns, et pleins d’eau à grant largesse, lesquels amplectoient la ville et ses forts jusques aux rivières courantes. Quatre

  1. Nous empruntons ce passage au Précis historique de l’influence des armes à feu sur l’art de la guerre, par le prince Louis-Napoléon Bonaparte, présid. de la Républ., p. 103. (Ext. de la Chronique de Molinet, t. V, ch. CCLXXXIII, p. 42.)