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fication ne saurait être antérieure au IIIe siècle[1]. Quant au mode adopté par les Romains dans la construction de leurs fortifications de villes, il consistait en deux forts parements de maçonnerie séparés par un intervalle de vingt pieds ; le milieu était rempli de terre provenant des fossés et de blocaille bien pilonnées, et formant un chemin de ronde légèrement incliné du côté de la ville pour l’écoulement des eaux ; la paroi extérieure s’élevait au-dessus du chemin de ronde, était épaisse et percée de créneaux ;

celle intérieure était peu élevée au-dessus du sol de la place, de manière à rendre l’accès des remparts facile au moyen d’emmarchements (5)[2].

Le château Narbonnais de Toulouse, qui joue un si grand rôle dans l’histoire de cette ville depuis la domination des Visigoths jusqu’au XIVe siècle, paraît avoir été construit d’après ces données antiques : il se composait « de deux grosses tours, l’une au midi, l’autre au septentrion, bâties de terre cuite et de cailloux avec de la chaux, le tout entouré de grandes pierres sans mortier, mais cramponnées avec des lames de fer scellées de plomb. Le château était élevé sur terre de plus de trente brasses, ayant vers le midi deux portails de suite, deux voûtes de pierres de taille jusqu’au sommet ; il y en avait deux autres de suite au septentrion et sur la place du Salin. Par le dernier de ces portails, on entrait dans la ville dont le terrain a été haussé de plus de douze pieds… On voyait une tour carrée entre ces deux tours ou plates-formes de défense ; car elles étaient terrassées et remplies de terre, suivant Guillaume de Puilaurens, puisque Simon de Montfort en fit enlever toutes les terres qui s’élevaient jusqu’au comble[3]. »

L’enceinte visigothe de la cité de Carcassonne nous a conservé des dispositions analogues et qui rappellent celles décrites par Végèce. Le sol de la ville est beaucoup plus élevé que celui du dehors et presque au niveau des boulevards. Les courtines, fort épaisses, sont composées de deux parements de petit appareil cubique, avec assises alternées de brique ; le milieu est rempli non de terre, mais de blocage maçonné à la chaux. Les tours s’éle-

  1. Voy. Hist de l’archit. en Belgique, par A. G, B. Schayes, t. 1, p. 203 (Bruxelles).
  2. Végèce, lib. IV. cap. III, tit. Quemadmodunt muris terra jungatur egesta.
  3. Annales de la ville de Toulouse, Paris, 1771, t. 1, p. 436.