Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 1.djvu/219

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[arc]
— 200 —

la galerie qui le surmonte à la cathédrale de Paris. Les piles s’élèvent isolées jusqu’aux voûtes qui, à Notre-Dame de Paris, sont au premier étage ; les jours B qui à Paris ne peuvent éclairer la nef qu’en passant à travers la claire-voie de la galerie supérieure, éclairent directement la nef à Bourges. Le second bas côté C est seul réduit aux proportions de celui de Paris et s’éclaire par des jours directs D. Deux triforiums EE décorent les murs d’adossement des deux combles FF des deux collatéraux. Les voûtes sont éclairées par les fenêtres G pratiquées, comme à Notre-Dame de Paris, au-dessus du comble du premier bas côté surmonté de sa galerie. C’est à Bourges plus que partout ailleurs, peut-être, qu’on aperçoit les efforts des constructeurs pour restreindre la hauteur des édifices religieux dans les limites les plus strictes. Examinons cette coupe transversale : impossible de construire un bas côté extérieur plus bas que le collatéral C ; il faut le couvrir, la hauteur du premier comble F est donnée forcément par les pentes convenables pour de la tuile ; il faut éclairer la nef, les fenêtres B sont larges et basses, elles commandent la hauteur du collatéral intérieur A ; il faut aussi poser un comble sur les voûtes de ce collatéral, la hauteur de ce comble donne l’appui des fenêtres G ; ces fenêtres supérieures elles-mêmes sont courtes, et d’une proportion écrasée, elles donnent la hauteur des grandes voûtes. Même proportion de la nef qu’à la cathédrale de Paris ; la nef de Bourges sous clef a environ en hauteur trois fois sa largeur. Ainsi donc, avant de chercher une idée symbolique dans la hauteur des nefs gothiques, voyons-y d’abord une nécessité contre laquelle les constructeurs se débattent pendant cinquante années avant d’arriver à la solution du problème, savoir : d’élever de grands édifices voûtés, d’une excessive largeur, de les rendre stables, de les éclairer, et de donner à toutes les parties de l’architecture une proportion heureuse. Or ce problème est loin d’être résolu à Bourges. Les piles seules de la nef sont démesurément longues, les fenêtres sont courtes, les galeries de triforium écrasées, le premier collatéral hors de proportion avec le second.

Si les doubles collatéraux étaient utiles dans le voisinage du transsept et du chœur, ils étaient à peu près sans usage dans les nefs, ne pouvant servir que pour les processions. On y renonça bientôt ; seulement, ne conservant qu’un bas côté dans les nefs des cathédrales, on le fit plus large. L’étroitesse des collatéraux doubles ou simples des églises de la fin du XIIe siècle et du commencement du XIIIe siècle était motivée par la crainte de voir leurs voûtes pousser les piles à l’intérieur (voy. Construction).

Dans le chœur de Beauvais, bâti dix ans plus tard que celui de Bourges, même disposition pour l’unique bas côté qui donne entrée dans les chapelles ; un triforium est percé dans l’adossement du comble de ces chapelles, et des fenêtres éclairant directement le chœur, sont ouvertes au-dessus du triforium sous les voûtes. À la cathédrale du Mans le chœur avec double bas côté, bâti pendant la première moitié du XIIIe siècle, présente