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vieux. Votre père ménage une transition entre des mœurs qui s’affaiblissent même dans les campagnes, mœurs vivantes encore cependant, et celles qui les doivent remplacer. Vous voyez donc que, s’il tient au passé, s’il essaye d’en conserver les bons côtés, il ne croit pas à sa perpétuité et prévoit le moment où il disparaîtra forcément, en présence des mœurs et des nécessités de l’époque. Autant paraissent naturelles les façons d’être de votre père parce qu’elles résultent d’habitudes non interrompues pendant plusieurs générations, autant il serait difficile à un nouveau venu de se conformer à ces habitudes. D’ailleurs ce domaine, que M. de Gandelau a si bien su faire fructifier, qu’il a augmenté, sera forcément divisé entre ses trois enfants lorsqu’il n’y sera plus. Déjà en a-t-il détaché une partie qui compose la dot de votre sœur. Eh bien, il entend que cette partie, dès à présent, soit mise en harmonie, par l’habitation que nous allons construire, avec les usages des nouveaux propriétaires qui sont jeunes et ont nécessairement des façons d’être différentes de celles qui conviennent encore à votre père. Plus tard vous apprécierez toutes ces choses. Allons travailler. »

Paul cherchait à mettre en ordre, dans sa tête, les graves propos que tenait son cousin. Il se rappelait la conversation des jours précédents, entre M. de Gandelau et sa mère, et des idées, toutes nouvelles pour lui, le préoccupaient visiblement. Quoi qu’il en soit, la vieille maison prenait à ses yeux une apparence vénérable, et il songeait à bien autre chose qu’à lui reprocher ses mauvaises distributions et ses dehors assez maussades.