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bien emmené avec lui M. Paul, mais tous deux étaient rentrés bredouilles, passablement mouillés. M. Paul avait, non sans un certain désappointement, trouvé les histoires dur garde longues et diffuses, d’autant qu’il les entendait pour la troisième fois sans beaucoup de variantes. Ajoutez à cela que le vétérinaire avait déclaré, le matin, que le poney de M. Paul devait garder l’écurie pendant une semaine, à la suite d’un refroidissement.

On avait bien lu le journal après dîner, mais M. Paul ne trouvait qu’un intérêt médiocre aux nuances de la politique, et quant aux faits divers, ils étaient déplorablement insignifiants.

M. de Gandelau (c’est le nom du père de Paul) était trop préoccupé des détails de son exploitation et peut-être aussi des soins qu’il était obligé de prendre de sa goutte pour chercher à soulever le voile d’ennui qui flottait devant les regards de monsieur son fils, et Mme de Gandelau, restée sous la triste impression du départ récent de sa fille aînée, travaillait avec une sorte d’acharnement à un ouvrage de tapisserie dont la destination était inconnue à tous et peut-être aussi à la personne qui posait si attentivement points contre points.

« Vous avez reçu une lettre de Marie ? fit M. de Gandelau en laissant là le journal.

— Oui, mon ami, ce soir… Ils sont ravis, le temps les favorise et ils ont, me dit-elle, fait les plus jolies excursions dans l’Oberland. Ils doivent maintenant passer le Simplon pour se rendre en Italie. Marie m’écrira de Baveno, hôtel de…

— Très-bien, et la santé ?

— Excellente.

— Et leur projet est toujours de se rendre à Constantinople pour cette affaire importante ?

— Oui ; N… a reçu, paraît-il, une lettre pressante ; leur