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le cordonnier François, et tant d’autres, même de nos jours, sont tous, sans aucune exception, fidèles au système classique.

Toute tentative contraire me semble inutile et vaine. Depuis trente ans que les littératures du nord de l’Europe ont été plus connues et étudiées, on a voulu substituer l’imitation allemande et anglaise à l’imitation grecque. Jusqu’ici tous ces essais ont été infructueux : il est vrai de dire que, depuis soixante ans, les essais dit classiques n’ont pas eu de résultats beaucoup plus heureux. Si les uns ont été extravagants, les autres ont été ennuyeux. Mais les peuples ne sont-ils pas comme les hommes ? N’ont-ils pas leur jeunesse, leur âge viril et leur caducité ? Les littératures de l’Inde, de la Grèce et de Rome ont eu un commencement, une perfection, une décadence. Il en a été déjà de même en Espagne et en Italie. Pourquoi en serait-il autrement en France ?

Bien des choses visibles viennent ajouter à cette cause fatale, occulte, et la hâter. Dans ce siècle égoïste, où il faut d’abord, malgré tout, se préparer une voie par tous les moyens et arriver, coûte que coûte, quelle place peut occuper le poète qui n’est utile à rien, et auquel il faut conséquemment un encouragement, une protection ? Sous un gouvernement constitutionnel, où est le pouvoir qui peut le protéger ? Dans la majorité jusqu’à ce qu’il tombe dans la multitude. Or, la majorité, très bonne peut-être pour discuter et régler les intérêts matériels de tous, est-elle véritablement apte à juger du mérite littéraire, qui en définitive ne contribue en rien à la nourriture, au vêtement, au bien-être du plus grand nombre. La voix publique peut seule indiquer, d’ailleurs, les hommes ou les œuvres dignes d’occu-