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dans le livre des pensées.

fira d’avoir, par un mot, averti mes auditeurs que je ne sors point de l’enceinte bien déterminée de mon sujet.

Les apologies du christianisme ont été ordinairement, du plus au moins, des ouvrages de circonstance ; et cela de deux manières. Souvent elles ont été destinées à repousser une attaque récente, dirigée sur un point particulier. Plus souvent, sans être aussi visiblement provoquées par la nécessité du moment, elles ont été, sous une grande apparence de généralité, un antidote spécial à la forme d’incrédulité qui dominait à l’époque où elles ont paru. Quelquefois même, renonçant à quelques-uns de leurs moyens, et prenant, si l’on peut s’exprimer ainsi, leurs adversaires en flanc, elles n’ont fait prévaloir qu’un côté de la vérité chrétienne, un reflet de sa lumière, un rayon de sa beauté, un caractère de sa grandeur. C’est dans cet esprit de condescendance et de précaution que M. de Chateaubriand a conçu le Génie du Christianisme. Dans tous ces cas différents, l’apologie, quelle qu’ait été d’ailleurs son étendue, s’est montrée essentiellement défensive, gardant son terrain, le protégeant de son mieux, mais ne s’avançant pas d’elle-même sur le terrain de l’ennemi. On peut concevoir néanmoins un autre genre d’apologie. Celle-ci n’attendrait pas la provocation : elle provoquerait ; elle n’aurait pas égard au besoin d’un siècle, mais au besoin de tous les temps ; elle n’attaquerait pas une espèce d’incrédulité : mais ayant