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george sand et l’amour

« Loin de me défier d’elle (de cette puissance d’aimer) et de ménager sa sève pour jouir plus longtemps de ses fruits, je l’excitai, je la développai, je lui donnai cours par tous les moyens possibles. Imprudente et malheureuse que j’étais. Je l’exhalais alors par tous les pores, je la répandais comme une inépuisable source de vie sur toutes choses… Ainsi agrandissant de jour en jour ma puissance, excitant ma sensibilité, et la répandant sans mesure au-dessus et au-dessous de moi, j’allais jetant toute ma pensée toute ma force dans le vide de cet univers insaisissable. »[1].

Dans ces dispositions « un homme vint, dit-elle, et je l’aimai… » Quelle déception ! « Vous avez raison de dire que la poésie a perdu l’esprit de l’homme : elle a désolé le monde réel, si froid, si pauvre, si déplorable au prix des doux rêves qu’elle enfante. Enivrée de ses folles promesses, bercée de ses douces moqueries, je n’ai jamais pu me résigner à la vie positive.

  1. Lélia, I, 179.