144 ACTE QUATRIEME Washington, avec une impatience concentrée et soucieuse Ah ! je me dis tout cela depuis longtemps ! Depuis la clai- rière de Mont-Vernon ! Voici donc bien des jours que j’en repousse l’idée ! Mais, à la longue, le sang de mes soldats tombés dans les embuscades me fait de la défiance un devoir. Tout est possible ! Les annales de tant de guerres m’avertissent... Tenez, laissons cela. (Un silence. Il a jeté un coup d’œil vers Harris et les soldats :) Grand prévôt, la seule présence d’un pareil otage au milieu d’une armée en marche constitue un péril. Ayant lieu, sans cesse, de redouter une traîtrise à ses côtés, le soldat n’est plus le même : il est à moitié vaincu ! Pour moi, luttant, déjà, contre les désertions, les murmures, contre l’héroïque misère de notre armement et de nos ressources, je n’ai que faire de nouveaux sujets d’inquiétude. (Franklin regarde Washington.) Avant tout, je réponds de l’Amérique ! Franklin, doucement Le salut de l’Amérique tiendrait-il aux intrigues d’une femme ? Washington , après une réflexion Soit. (Appelant :) — Un officier ! (Un aide de camp se présente au dehors. Sur un signe, il s’approche vivement de Washington. ) RUTH, à elle-même, après un regard vers Stephen, qui est demeuré immobile Comme il doit souffrir ! Washington, très-bas, à l’aide de camp Rejoignez l’artillerie. Je m’attends à un coup de main tenté sur cet avant-poste. Faites pointer, sur cette masure même, une batterie de nos meilleurs canons. Aux premiers bruits d’attaque, vous ferez ouvrir le feu. (L’aide de camp s’incline et sort à la hâte ; l’instant d’après, on le voit passer, au galop, devant les fenêtres. )
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