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de feuilles tombées, le lait matinal ! — Et nous fuyons ! Bientôt voici des humains, sur les routes ! puis un village !… puis une ville !… des villes ! puis le soleil ! puis le monde !

Un grand silence.
Axël, d’une voix étrange, très calme, — et la regardant

Sara ! je te remercie — de t’avoir vue. L’attirant entre ses bras : Je suis heureux, ô ma liliale épousée ! ma maîtresse ! ma vierge ! ma vie ! je suis heureux que nous soyons ici, ensemble, pleins de jeunesse et d’espérance, pénétrés d’un sentiment vraiment immortel, seuls, dominateurs inconnus, et tout rayonnants de cet or mystérieux, — perdus, au fond de ce manoir, pendant cette effrayante nuit.

Sara

Là-bas, tout nous appelle, Axël, mon unique maître, mon amour ! La jeunesse, la liberté ! le vertige de notre puissance ! Et — qui sait, de grandes causes à défendre… tous les rêves à réaliser !

Elle va vers les lueurs de l’aurore et tient la draperie soulevée.